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Santé publique France alerte sur la santé des femmes enceintes

Publié le par Marion Bellal

Le rapport de Santé publique France, tout juste publié, vient de dresser un constat inquiétant sur la santé des futures mamans et de leurs bébés en France. Le professeur Yves Ville, Chef de service de la maternité de l'hôpital Necker, à Paris, réagit dans une interview-choc accordée au Parisien. Extraits.

À la suite de la publication, mardi 20 septembre 2022, d'un rapport de Santé publique France déclarant comme « préoccupants » les résultats de l'enquête concernant la santé périnatale en France, le professeur Yves Ville, chef de service de la maternité de l'hôpital Necker, à Paris, s'est exprimé sur le site du Parisien

Des chiffres qui doivent alerter

Mené de 2010 à 2019 (soit avant le début de la pandémie de Covid-19), le rapport de Santé publique France détaille les conséquences du manque de personnel dans les maternités françaises et insiste sur les inégalités territoriales. En Outre-mer, particulièrement en Guyane et à Mayotte, le taux de mortalité maternelle est 4 fois, et celui de morts-nés 1,5 fois, plus élevés qu'en métropole. De plus, le suivi médical pendant et après la grossesse y est aussi, en moyenne, plus précaire. Un tiers des accouchements en Guyane n'est pas couvert par l'Assurance maladie, tandis que deux tiers des femmes enceintes n'ont pas de couverture sociale à Mayotte.  

Sur l'ensemble du territoire français, la mortalité néonatale (entre la naissance et le 27e jour de vie) s'est légèrement aggravée entre 2010 et 2019. Alors qu'étaient répertoriés 1,6 décès pour 1 000 naissances en 2010, on était à 1,8 en 2019. Les causes de cette dégradation ne sont pas encore établies. Quant à la mortalité maternelle, elle n'a pas diminué significativement en 10 ans, et des pathologies, telles que l'hypertension ou le diabète gestationnel, se répandent. Et le développement des dépistages ne peut expliquer qu'une partie de cette augmentation.

Enfin, d'autres facteurs de risques toujours très présents, dont l'obésité et le tabagisme, sont préoccupants. 

« Si les grossesses à risque ne sont pas bien suivies, ce sont des bombes à retardement ! »

En réaction à la publication de ce rapport, Yves Ville, chef de service de la maternité de l'hôpital Necker, alerte sur le site du Parisien quant à l'indispensable suivi des grossesses dites à risque : « 20 % des femmes ont leur premier bébé à plus de 35 ans (...) Pourquoi ? Parce qu’elles ont une carrière à gérer et que la maternité n’est plus, fort heureusement, le but de leur vie. C’est plutôt une victoire ! On constate qu’il y a aujourd’hui de plus en plus de complications. Mais tout se gère ! Ce qui m’inquiète, en revanche, c’est la tendance généralisée d’un retour à la nature qui s’oppose à la médecine. Si les grossesses à risque ne sont pas bien suivies, ce sont des bombes à retardement ! Or, aujourd’hui, il y a un déni. La médicalisation est perçue comme un acte de malfaisance, alors qu’au contraire, elle permet d’assurer leur sécurité. »

« Une youtubeuse est plus écoutée qu’un professeur d’obstétrique »

Le gynécologue obstétricien illustre son propos en témoignant observer une phobie du déclenchement, alors qu'une femme enceinte plus tardivement, et donc à risque d'hypertension et de diabète gestationnel, devrait, selon lui, accoucher au maximum au cours de la 40e semaine. « On entend de plus en plus "le bébé viendra quand il viendra". C’est dangereux ! Aujourd’hui, une youtubeuse est plus écoutée qu’un professeur d’obstétrique », regrette-t-il.

Un "quatrième trimestre" à prendre en considération

Le professeur Yves Ville appelle également à améliorer le suivi durant et après la grossesse. Il déplore le manque de dépistage en France, par exemple, le manque de tests permettant de déceler un risque élevé de formes sévères de prééclampsie, bien qu'il suffise ensuite, en cas de problème, de prescrire de l'aspirine. De même pour le tabac : si une consultation a été instaurée au 4e mois afin d'aider les femmes enceintes à arrêter de fumer, celle-ci est majoritairement utilisée pour du suivi de grossesse, les maternités étant débordées.

Par ailleurs, le spécialiste insiste sur la nécessaire prise en charge de l'après : « Si, jusque dans les années 2000, l’hémorragie et l’infection étaient les deux premières causes de mortalité à l’accouchement, ce sont désormais les risques cardiovasculaires et le suicide, dans l’année qui suit. On ne prend pas en compte la dépression post-partum. Ni le fait que la grossesse est un stress cardiovasculaire énorme. À 40 ans, après avoir mis un enfant au monde, on a autant de risque qu’un homme de 60 ans de faire un infarctus. »

 

 

 

 

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