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Grossesse : une alimentation maternelle déséquilibrée peut affecter le système digestif de l'enfant

Publié le par Alexandra Bresson

En étudiant chez les rats le lien entre la malnutrition chez la mère pendant la grossesse et le fonctionnement du système digestif chez l'enfant, des chercheurs ont constaté qu'une carence en protéines chez la femelle en gestation est associée à des anomalies digestives durables pour la descendance.

La période gestationnelle est extrêmement sensible pour le développement normal du fœtus et pour le maintien en bonne santé de l'enfant tout au long de sa vie. Plusieurs études ont déjà mis en évidence qu’une malnutrition maternelle avait des retentissements sur le développement cardiovasculaire ou encore cognitif de la descendance, avec des répercussions possibles à l’âge adulte. Cette fois, les chercheurs ont étudié ces effets sur le système digestif de ratons, peu avant l’âge adulte. Pour cela, ils ont réduit de moitié les apports en protéines des mères pendant toute la durée de la gestation et de la lactation, puis réintroduit une alimentation normale une fois les ratons sevrés.

Les chercheurs ont étudié dans un premier temps le fonctionnement du système digestif des ratons et en particulier le transit et la perméabilité intestinaux. Le premier correspond à la fréquence et la vitesse de passage des selles, et le second représente la capacité de passage des nutriments et autres molécules à travers la paroi intestinale vers la circulation sanguine. Dans un premier temps, ils ont constaté une augmentation de ces deux paramètres chez les animaux dont les mères avaient présenté une carence en protéines. Par ailleurs, l’équipe a relevé chez ces derniers des taux élevés d’hormone du stress. Pour comprendre ces dysfonctionnements, ils les ont soumis à un stress psychologique « modèle ».

Pas de régime trop restrictif durant la grossesse

Chez des rats « témoins », une situation de stress, mimée par un isolement sur une plateforme sans issue au milieu d’une bassine d’eau, déclenche une accélération du transit et une augmentation de la perméabilité. Or, cette réponse était altérée chez les ratons dont les mères avaient été carencées : leur activité digestive de base est plus importante mais n’augmente pas au cours du stress. « Leur réponse au stress semble mal adaptée, comme si le stress périnatal désensibilisait la réponse au stress aigu au cours de la vie future », suggère Hélène Boudin, chercheuse Inserm et codirectrice de ce travail. Les chercheurs ont ensuite voulu savoir si le système nerveux digestif était également modifié.

Ils ont constaté que l’hormone du stress induisait un excès de neurones stimulant la motricité et la perméabilité intestinales. En plus d’être nombreux, ces neurones présentent le défaut d’être incapables d’éliminer naturellement les déchets et toxines. Or ce défaut est « annonciateur d’une mauvaise capacité à répondre au stress », clarifie Hélène Boudin. Ces observations ont permis aux chercheurs de poser cette hypothèse : une carence nutritionnelle pendant la grossesse conduirait à une augmentation de l’hormone du stress chez la descendance, qui induirait elle-même un remodelage du système nerveux digestif à long terme. Avec à terme des troubles digestifs pouvant impacter la qualité de vie.

« Ces travaux renforcent aussi l’hypothèse de l’origine prénatale de certaines pathologies ou troubles digestifs. D’autre part, les mécanismes mis en jeu par le stress périnatal étudié pourraient être partagés avec ceux présents dans d’autres pathologies de la malnutrition (comme la sur- et la sous-alimentation) et peut-être aussi dans des pathologies neuro-développementales incluant certaines maladies psychiatriques », conclut Hélène Boudin. Pour la chercheuse, bien que l'étude soit menée sur des animaux, elle démontre l’incidence du stress périnatal sur la santé de l’adulte et pointe les dangers des carences involontaires ou provoquées par des régimes restrictifs pendant la grossesse.

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