Le phénomène, « s’enracine durablement en France » et ne touche plus seulement les Français les plus pauvres mais « un public beaucoup plus varié ». Dominique Besançon, déléguée générale de Dons solidaires, une association qui récolte des dons de produits non alimentaires pour les redistribuer à un réseau d’associations de lutte contre la précarité, est inquiet, très inquiet même.
La précarité hygiénique, le phénomène dont il parle, est de plus en plus prégnant en France. En effet, selon le baromètre Hygiène et Précarité, commandé par son association et réalisé par l’Ifop, un Français sur deux affirme que le contexte économique actuel l’incite à réduire, par manque d’argent, sa consommation de produits d’hygiène. En 2023, ils étaient 34%, soit une augmentation de 16 points sur une année.
1/4 des femmes privées de protections menstruelles par manque d’argent
Selon ce baromètre, plus d’une personne sur cinq a déjà dû choisir entre acheter de la nourriture et un produit d’hygiène et même à contrôler leurs utilisations. Ainsi, 41% des parents disent vérifier la consommation de gel douche de leurs enfants (ils n’étaient que 20% à agir ainsi il y a cinq ans) et un tiers des Français prolonge l’utilisation de produits à usage unique. Autres chiffres inquiétants. : 23% disent contrôler la consommation de papier toilette et... 11% se lavent parfois sans savon !
Les femmes sont particulièrement touchées par cette « précarité hygiénique ». Et on ne parle pas ici de simples produits de confort mais d’un besoin impérieux : l’utilisation de protections périodiques. 16% des femmes réglées ou ayant une enfant réglée à la maison disent ainsi avoir déjà manqué de serviettes hygiéniques ou de tampons par manque d’argent. La précarité menstruelle s’aggrave et touche de plus en plus de femmes puisqu’elles n’étaient « que » 8% en 2019. A noter par ailleurs que ce taux explose chez les jeunes femmes, qui sont 28% dans ce cas.
Mais la catégorie de la population la plus concernée - et ce n’est pas vraiment une surprise - est les jeunes. « Les taux de renoncement à l’achat dans ce public sont alarmants », souligne ainsi Dominique Besançon. 41% des 18-24 ans ont déjà dû arbitrer entre un achat de nourriture et de produit d’hygiène. La déléguée générale de Dons solidaires explique qu’il s’agit des étudiants, des jeunes éloignés de l’emploi, mais aussi « des jeunes travailleurs qui ont un emploi mais qui, avec les crises et l’inflation, ont du mal à joindre les deux bouts ».