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« Il n’y avait personne pour m’écouter » : un ado abandonné a vécu seul chez lui, le père condamné

Publié le par Jessica Ferret

Un jeune adolescent de 16 ans a été livré  à son propre sort par son père, durant deux mois, avec seulement 20 euros en poche. Ce 18 décembre, le papa a été condamné à 3 mois de prison avec sursis.

Les faits se sont déroulés dans l’Oise, un homme de 59 ans, Bruno D., ressortissant haïtien, a été jugé ce lundi soir par le tribunal de Senlis pour soustraction par un parent à ses obligations légales compromettant la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de son enfant et violence avec usage d’une arme. Ne se souciant pas vraiment du délibéré, l’homme en question n’a pas attendu de connaître la décision du juge pour rentrer à Monaco sur le chantier sur lequel il travaille depuis déjà quelques mois. 

L'adolescent s'est confié à la CPE du collège

C’est pourtant ce même chantier qui a poussé le tribunal à condamner le père de famille puisque c’est ce qui l’a amené à abandonner à son sort son jeune fils de 16 ans seul à leur domicile, pendant presque 2 mois, du 21 janvier au 14 mars 2023. Une situation qui a été signalée au procureur par le lycée André-Malraux de la ville de Montataire après qu’ils aient remarqué un comportement étrange du garçon. En effet, étant habituellement sérieux et calme, une altercation avec un autre élève a poussé la CPE à le convoquer dans son bureau. Une discussion s’en est suivi pendant laquelle l’élève s’est confié sur sa solitude en expliquant que son père ne rentrait à la maison qu’un seul jour par mois. 

Le père justifie l'abandon par ses obligations professionnelles

Il a été découvert que l’adolescent de 16 ans avait été laissé par son père avec une somme de 20 euros pour subvenir à ses besoins, ainsi que de la nourriture . L’enfant souffrant d’une solitude extrême a quitté sa famille en Haïti à l’âge de 15 ans, sa mère étant restée sur l’île, pour vivre avec un père qu’il ne connaissait pas : « Il n’y avait personne pour m’écouter, pour parler » explique-t-il désorienté. Devant le tribunal, le père a essayé de justifier son comportement en invoquant son travail : « Ma mutation à Monaco devait durer six mois, mais elle a été prolongée. J’avais demandé à un ami d’héberger mon fils pendant mon absence, mais il préférait rester à la maison. Je l’ai laissé seul pour ne pas perdre mon travail. J’avais acheté ce qu’il faut pour manger et je lui ai laissé un peu d’argent. »

Un père également violent

De plus, l’enquête a révélé que Bruno D., quand il était là, pouvait même se montrer violent avec l’enfant utilisant un ceinturon pour le frapper à de nombreuses reprises. Des faits que le père de famille n’a pas démentis, mais qu’il justifie par une méthode d’éducation : « Je l’ai frappé avec un ceinturon parce qu’il mentait, mais je ne l’ai pas frappé brutalement ». Une situation qui ne laisse pas de marbre l’avocate défendant les intérêts de l’enfant devant Le Parisien : « Je ne sais pas ce qui est le pire, entre les coups et la solitude, pour ce garçon venu vivre avec un père qu’il ne connaissait pas». 

L'adolescent a été placé

Devant la cour, l’avocate œuvrant dans les intérêts de l’adolescent, Maître Stéphanie Pacaud, a développé sa plaidoirie : « Il est inconcevable de soutenir que la situation professionnelle justifierait l’abandon de son fils, il n’y avait pas d’état de nécessité » réclamant plus de cinq mois de prison avec sursis. Du côté de l’accusé, son avocat maître Barbara Enkler, a défendu son client : « le monde du travail est dur et il n’a eu qu’un mois pour se préparer à cette mutation. En la refusant, il aurait été licencié pour faute grave. Il appelait son fils tous les matins pour le réveiller et il revenait toutes les deux semaines.» Des arguments insuffisants aux yeux de la loi puisque Bruno D. a été condamné à trois mois de prison avec sursis accompagné d’un versement de 800 euros à son fils en termes de dommages et intérêts. À l’heure actuelle, l’adolescent a été placé, l’avocate explique au Parisien : « À sa majorité, il sera encore accompagné dans une semi-autonomie, jusqu’à ses 21 ans. »