« Une priorité absolue », c’est comme ça qu’avait décrit la lutte contre le harcèlement scolaire, la Première ministre, Élisabeth Borne. Parmi les mesures annoncées par le gouvernement le 27 septembre 2023 : des grilles d’auto-évaluation, la mise en place de cours d’empathie, une saisine systématique du procureur, ou encore un bannissement des réseaux sociaux.
« Dans ce plan, il y a de bonnes choses, il y a des choses beaucoup moins bonnes et il y a des choses catastrophiques », déclare Bruno Humbeeck, psychopédagogue belge spécialisé dans la prévention des violences scolaires et familiales, pour qualifier les outils qu’a choisi d’utiliser l’exécutif.
En effet, pour le professionnel, certaines des mesures annoncées, ne s’adaptent pas à la situation actuelle et témoignent d'une « méconnaissance du phénomène » de la part du gouvernement : « L’idée de confisquer les portables des élèves harceleurs, c’est de la poudre aux yeux, et ça ne veut rien dire. On sait qu’on a affaire, notamment dans le cyberharcèlement, à un effet de meute. Un élève dont le portable a été confisqué, peut très bien aller chercher un autre support pour avoir accès aux réseaux sociaux. Ça veut dire que vous allez devoir confisquer les portables de toute la classe. Il n’y a pas une personne qui est responsable de la totalité de l’agression. Ça montre qu’on n’a rien compris ».
Des décisions prises dans « un mouvement de panique »
Le 17 août 2023, un décret publié au Journal Officiel avait annoncé que, désormais, un élève coupable de harcèlement scolaire et de cyberharcèlement envers l’un ou l’une de ses camarades devrait quitter l’établissement dans lequel il se trouve. Jusque-là, le changement d’école s’appliquait uniquement aux victimes. Selon Bruno Humbeeck, cette mesure va totalement à l’encontre de la volonté de protéger l’élève harcelé : « Ça semble très chouette de dire qu’on va exclure l’élève harceleur et ne pas obliger l’élève harcelé à changer d’école sauf qu’il faut comprendre que le harceleur est souvent quelqu’un de très populaire dans sa classe. Donc si vous y laissez un élève qui est beaucoup moins populaire, eh bien la classe va lui faire payer ».
Ces incohérences sont le reflet, pour le psychopédagogue, d’un « mouvement de panique », qui se traduit par de « fausses solutions, des fausses pistes ». Le constat de Bruno Humbeeck est donc clair : « Il y a des décisions qui ont été prises, plutôt pour jeter de la poudre aux yeux, que pour être réellement efficace ».