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L'annonce du congé de naissance suscite le scepticisme : « Trouver des solutions ne veut pas dire n'importe lesquelles »

Publié par Alice Dubois  |  Mis à jour le

Lors d’une conférence de presse le 16 janvier, le Président de la République a annoncé la création d’un congé de naissance. Ce nouveau congé devrait remplacer l’actuel congé parental. Il durerait 6 mois et serait mieux rémunéré. Nous avons demandé à Catherine Bonneville-Morawski, consultante et Elsa Foucraut, membre de l’association Parents et Féministes quels sont les plus et moins de cette décision. On fait le point.

Dans une optique de « réarmement de la natalité » Emmanuel Macron a annoncé un plan de lutte contre l’infertilité ainsi que la création d’un congé de naissance d’une durée de 6 mois, mieux rémunéré que le congé parental existant. Pour rappel le congé parental permet à l’un des deux parents d’arrêter de travailler jusqu’aux 3 ans de l’enfant, pour la somme de 429 euros par mois.

Lutter contre l’éloignement professionnel des mères

Pour le gouvernement, supprimer ce congé parental de 3 ans, au maximum, viserait aussi à éviter « l’éloignement des femmes du monde du travail », puisque seul 0,8 % des pères prennent ce congé. Cette coupure crée une vraie rupture dans la carrière des femmes, et impacte leur retraite. Pour Catherine Bonneville Morawski, consultante spécialisée sur la question de la mixité en entreprise, et le développement des carrières des femmes si « l’éloignement du marché du travail durant 3 ans est trop long et qu’il serait bien de trouver des solutions pour le réduire, trouver des solutions ne veut pas dire trouver n’importe lesquelles ». Pour la consultante, si les annonces restent encore floues, la possibilité de remplacer un congé de 3 ans par un congé de 6 mois risque de laisser « sur le bord de la route de nombreuses mères qui à défaut de mode de garde se retrouveront en état de démission ou au RSA ou au chômage pour s’occuper de leurs enfants ».

Ne nous y méprenons pas, si Catherine Bonneville-Morawski parle principalement des mères et non des pères, c’est aussi car ce sont souvent elles qui ont des salaires inférieurs, et donc réduisent voire interrompent leur activité pour s’occuper des jeunes enfants. Un choix qui entraine un cercle vicieux car, cinq ans après la naissance d’un bébé, le revenu salarial des mères est de 20 % inférieur à ce qu’il aurait été sans enfant selon l’Insee.« Un écart qu’elles ne rattrapent pas » estime la consultante.

Et la question des modes de garde avant 3 ans ?

Pour Elsa Foucraut, membre l’association Parents et Féministe, l'idée d'une revalorisation des congés parentaux est une demande de longue date de la part des associations. Toutefois, annoncer de telles mesures sans mettre en parallèle la grande difficulté qu’éprouvent les parents à trouver un mode de garde, et pour les plus modestes à les financer est aberrant. « Aujourd’hui le congé parental tel qu'il existe aujourd'hui n'est pas satisfaisant, mais dans un contexte très particulier qui est celui de la crise du secteur de la petite enfance, il est une solution pour beaucoup de parents, même s'il est parfois subi ». Un constat partagé par Catherine Bonneville « j’aurais applaudi des deux mains si l’annonce avait été pour « chaque naissance on assure une offre de garde », là on s’attaquerait vraiment à l’éloignement des femmes de l’emploi ».

Un problème culturel et salarial en entreprise

L’idée que les femmes et les hommes puissent être perçus de manière égale par l’entreprise comme pouvant prendre une pause parentale de 6 mois est une excellente idée, à l’épreuve des faits et de la culture en entreprise c’est une autre paire de manches selon Catherine Bonneville-Morawski. En effet, si on prend pour exemple le taux de recours au congé paternité, il n’est obligatoire que pour 7 jours alors qu’il est de 25 jours calendaires. Les pères sont encore nombreux à ne prendre que le minimum et pour certain à ne pas le prendre du tout. « les mesures incitatives pour que les père prennent des congés parentaux ne fonctionnent pas » estime Elsa Foucraut de Parents et Féministres « le congé paternité lui aussi devrait être rendu obligatoire. Qu'il devienne un congé qui n’est pas uniquement un droit pour les parents mais aussi une obligation parentale de s’occuper d’un enfant qui vient de naître » ajoute-t-elle.

Par ailleurs, si ce congé de naissance n’est pas rendu obligatoire pour les pères et en raison des écarts de salaires entre hommes et femmes « aucun mari ne prendra des congés pour garder son enfant et risquer de mettre le foyer dans une situation financière encore plus fragile » se désole Catherine Bonneville-Morawski.

Des annonces encore floues

Malgré ces inquiétudes, le constat est partagé, les modalités de ce nouveau congé restent encore trop floues. On ignore le niveau de rémunération prévu, on ignore s’il peut être pris à temps partiel ou seulement à temps complet. La suppression du congé parental tel qu’il existe aujourd’hui n’est pas non plus confirmé. « c’est encore difficile de se prononcer car nous n’avons pas tous les détails . Les signaux sont contradictoires. On a des signaux qui laissent à penser que la réforme pourrait être ambitieuse et à l’inverse des signaux qui laissent à penser que ça pourrait être davantage une réforme d’économie budgétaire qu'une réforme sociale au bénéfice des femmes » confie Elsa Foucraut. Affaire à suivre.

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