Bientôt ou déjà parents, on vous accompagne !

Famille tuée à Meaux : atteint de troubles psychiatriques, le père de famille pourra-t-il être jugé ?

Publié le par Jessica Ferret

Interpellé et soupçonné du meurtre de sa femme ainsi que de ses quatre enfants, le père de famille va bientôt subir une batterie d’expertises permettant de déterminer s’il était pleinement conscient au moment des faits et que son discernement n’était pas aboli ou altéré. 

Un terrible drame a eu lieu à Meaux ce lundi 25 décembre 2023. Une mère de famille de 35 ans ainsi que ses quatre enfants âgés de 10, 7, 4 ans et 9 mois ont été tués à l’arme blanche à leur domicile. La voisine, avec qui ils devaient passer le réveillon de Noël, inquiète de ne pas avoir eu de nouvelles, s’est rendue à l’appartement de son amie. Trouvant porte close ainsi que des traces de sang sur la poignée et sur le palier, elle décide d’avertir la police. 

Sur place, les policiers font une macabre découverte, le père de famille ne se trouvant pas sur les lieux est retrouvé le lendemain chez son père à Sevran. Interpellé, l’homme de 33 ans a reconnu les faits. Mais sera-t-il jugé pour le quintuple homicide ? En effet, les enquêteurs se concentrent aujourd’hui sur le profil psychiatrique du père de famille. Selon les premières informations recueillies, l’homme serait atteint de troubles dépressifs et psychotiques depuis 2017. 

La responsabilité pénale est-elle engagée ?

En conférence de presse ce mardi 26 décembre, le procureur de la République, Jean-Baptiste Bladier, a indiqué que lors de la fouille du domicile « des documents administratifs pouvant évoquer un internement de nature psychiatrique en 2017 » ainsi que « des ordonnances de prescription de tranquillisants » ont été retrouvés concernant le père de famille. Une agression au couteau sur sa compagne alors qu’elle était enceinte de 8 mois en 2019 a également été attestée. Si sa femme n’avait pas souhaité porter plainte au moment des faits, l’homme avait été déclaré déficient mental puis hospitalisé dans un hôpital psychiatrique durant deux mois. La procédure avait été classée sans suite. 

Souffrant de dysthymie ainsi que de trouble persistant de l’humeur, le père de famille qui a également fait plusieurs tentatives de suicide entre 2017 et 2019 a été diagnostiqué comme dépressif chronique. Ces troubles peuvent être à l’origine de cette tuerie ? Seuls experts psychiatriques pourront répondre à cette question. Mandatés par la justice, ils devront déterminer si le père de famille est responsable pénalement des faits qui lui sont reprochés et si certains de ces troubles ont pu altérer ou abolir son discernement. 

Un état psychiatrique décortiqué

Dans ce travail minutieux, les experts devront se poser plusieurs questions comme le révèle Roland Coutanceau, psychiatre et expert judiciaire pour BFMTV : « D’abord, le sujet est-il atteint d’une maladie mentale telle que la schizophrénie, la psychose paranoïaque ou le délire chronique qui mettent les gens en dehors de la réalité ? » explique-t-il avant de poursuivre : « Ensuite, si une maladie mentale est décelée, on se demande si au moment des faits, cette pathologie était en poussée aiguë, c’est-à-dire : le patient était-il en proie à une bouffée délirante ? Enfin, on se demande si ces éléments délirants ont sous-tendu le passage à l’acte. Ce serait l’exemple d’une personne qui a l’impression que son voisin est possédé par le diable, il ne le voit plus comme un être humain. Dans son délire, il veut s’attaquer au diable ». 

Par contre, il est important de préciser que «la dépression à elle seule ne favorise pas une telle violence et un tel acharnement». En effet Laure Westphal, psychologue clinicienne au GHU de Paris explique : « Là, c’est clairement une décompensation psychotique dont il s’agit ». Les experts vont donc entendre le suspect et prendre en compte ses réponses pour déterminer si sa pensée est altérée. Selon Olivier Dubois, psychologue, « s’il dit “le monde va mal, la société est inadaptée, j’entendais des voix qui me disaient attention ta famille et tes enfants sont en très grand danger, il faut les protéger”, ce genre de réponse signerait l’altération de la pensée du sujet. »

Une réponse pénale différente selon l’état psychiatrique du père de famille

L’analyse des experts va donc permettre de déterminer si le père de famille est responsable pénalement. S’il est déclaré en pleine possession de ses moyens au moment des faits, il risque une peine de prison à perpétuité pour homicides volontaires sur mineurs et conjoint. Par contre, si les experts considèrent que son discernement a été altéré, la peine sera moins importante : « Si c’est une altération, on considère que le discernement a été obscurci, mais pas totalement aboli, et donc la personne va devoir répondre de ses actes et être jugée. En revanche, il n’y aura pas de réponse médicale » explique l’avocate pénaliste Juliette Bissière. Il risque alors jusqu'à 30 ans de réclusion.

Dans le cas où il est prouvé que le discernement de l’homme de 33 ans est aboli, il ne peut être déclaré responsable de ses actes comme l’indique l’article 122-1 du Code pénal : « n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ». Il pourrait être incarné en psychiatrie.