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COVID-19 : les enfants ne bénéficient pas d'une immunité croisée liée aux autres coronavirus

Publié le par Alexandra Bresson

Dans une nouvelle étude, des chercheurs de l’Institut Pasteur ont montré que les fréquentes infections des enfants par les coronavirus saisonniers ne les protègent ni de l’infection par le virus SARS-CoV-2, responsable de la Covid-19, ni des formes graves apparentées à la maladie de Kawasaki. Or, l’existence d’une telle immunité aurait un impact important sur la compréhension de l’avenir de l’épidémie.

Si dans la famille des coronavirus le SARS-CoV-2 fait particulièrement parler de lui ces derniers mois, il s'agit d'une famille de virus répandue dont certains sont responsables chaque hiver de rhumes et bronchites répétées dès l'enfance. Ces derniers se transmettent par voie aérienne, au contact de sécrétions ou à celui d’objets contaminés, particulièrement à chaque période hivernale. Ainsi, la question de l’éventuelle immunité croisée conférée par les coronavirus dits « saisonniers » vis-à-vis de la Covid-19, a été récemment posée par la communauté scientifique en raison de la mise en évidence d’anticorps reconnaissant le virus SARS-CoV-2 chez certains individus avant la phase épidémique.

Qu'en est-il réellement ? Cette hypothèse concerne-t-elle aussi les enfants ? Pour répondre à cette question, une équipe de chercheurs français*, dont ceux de l’Institut Pasteur, a conduit du 1er mars au 1er juin 2020 une étude dans 7 hôpitaux parisiens et de la proche couronne, auprès de 775 enfants (de 0 à 18 ans), dont 36 présentaient un syndrome apparenté à la maladie de Kawasaki. En effet, plusieurs études menées sur des enfants souffrant de symptômes inflammatoires sévères faisant penser à cette maladie aiguë, caractérisée par une inflammation de la paroi des vaisseaux sanguins, ont montré que la maladie serait nouvelle et distincte de la maladie de Kawasaki classique.

Les enfants font des formes de Covid-19 peu symptomatiques

L’étude appelée PED-COVID visait à déterminer la fréquence, le type et la concentration d’anticorps produits par les enfants en réponse à l’infection et la capacité de ces anticorps à neutraliser le SARS-CoV-2. Les chercheurs ont mesuré la fréquence et les titres des anticorps actifs contre quatre coronavirus saisonniers (NL63, HKU1, 229E, OC43) auprès d'un sous-ensemble de patients qui ont été atteints par l'infection, avec pas (ou peu) de symptômes et auprès de patients hospitalisés pour un syndrome apparenté à la maladie de Kawasaki. Les résultats ont montré plus de 2/3 des enfants avec un syndrome apparenté à la maladie de Kawasaki étaient séropositifs pour le SARS-CoV-2.

Mais surtout, les chercheurs ont constaté que la présence et le taux d'anticorps contre les quatre coronavirus saisonniers, retrouvés chez 67-100 % des enfants en fonction des virus, étaient comparables entre les enfants séronégatifs et les enfants séropositifs pour le virus de la Covid-19. Et ce qu’il s’agisse des enfants malades avec syndrome apparenté à la maladie de Kawasaki ou de ceux qui ont fait une forme pas (ou peu) symptomatique. Ces résultats suggèrent que les enfants, qui par ailleurs seraient en réalité peu contaminés et peu contaminants selon une récente étude, développent des formes de Covid-19 souvent pas (ou peu) symptomatiques et développent des anticorps le plus souvent neutralisants.

« Pas de protection significative » liée aux coronavirus de l'hiver

Mais ce n'est pas pour autant qu'ils sont protégés contre le SARS-CoV-2 et donc qu'une immunité croisée se met en place, comme l'explique Marc Eloit, dernier auteur de l’étude à l’Institut Pasteur. « L'infection par les coronavirus saisonniers n'offre pas une protection significative contre l'infection par le virus SARS-CoV-2 et les autres maladies associées comme le syndrome apparenté à la maladie de Kawasaki. » commente-t-il. Et si cette étude permet de confirmer la très grande fréquence et le taux important d’anticorps développés contre les coronavirus saisonniers au sein de la population générale, ce phénomène n’empêche pourtant pas les infections causées par ces virus chaque hiver.

« Si le virus de la Covid-19 se comporte comme les coronavirus saisonniers, cette observation interroge sur la capacité de la population à atteindre un niveau d’immunité suffisant pour empêcher la réapparition régulière de la maladie » conclut Marc Eloit. A noter qu'une autre étude de l'Institut Pasteur basé sur le « cluster » de Crépy-en-Valois laisse entendre que les enfants de 6 à 11 ans s’infectent plutôt en milieu familial qu’à l’école. Cette étude confirmait également de son côté que le plus souvent les jeunes enfants, lorsqu'ils sont infectés par ce coronavirus, ne développent pas de symptômes de la maladie ou présentent des symptômes mineurs qui peuvent ne pas conduire à évoquer le diagnostic.

*Un consortium de laboratoires de l’Institut Pasteur et de cliniciens de l’AP-HP, de l’Inserm et de l’Université de Paris

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