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Agressions sexuelles dans l’enfance: les séquelles psychologiques et physiques sont étroitement liées

Publié le par Alexandra Bresson

Une récente étude indique les jeunes filles victimes d'une agression sexuelle présentent, outre une détresse psychologique, un plus grand risque de souffrir de problèmes de santé génitale et urinaire dans les années qui suivent. Des résultats qui, selon les chercheurs, montrent l'importance d'une prise en charge globale pour ces dernières.

Et si les séquelles psychologiques laissées par une agression sexuelle chez les jeunes filles jouaient un rôle dans l’apparition de problèmes de santé génitale et urinaire ? Tel est le constat issu d'une étude menée par des chercheurs de l’Université de Montréal, qui avait pour but de favoriser une meilleure intervention des professionnels de la santé afin que l’enfant puisse se rétablir autant sur le plan physique que psychologique. Ces travaux font suite à une première étude réalisée par ces chercheurs, et ayant révélé que les filles victimes d’une agression sexuelle recevaient 2,1 fois plus de diagnostics médicaux pour des problèmes de santé urinaire et 1,4 fois plus pour des problèmes de santé génitale.

Cette nouvelle étude publiée dans la revue « Health Psychology » est unique, car il s'agit de la première fois que les problèmes de santé génito-urinaire et les problèmes de santé psychologiques sont étudiés ensemble, auprès d’un aussi large échantillon de filles dont l’agression sexuelle a été corroborée, sur plus d’une décennie. Les données médicales utilisées par les chercheurs ont été fournies par la Régie de l’assurance maladie du Québec et par le ministère de la Santé et des services sociaux. L’étude a porté sur 661 filles, âgées de 1 à 17 ans, victimes d’une ou de plusieurs agressions sexuelles corroborées, et 661 filles de la population générale (membres du « groupe de comparaison »).

« Davantage de consultations pour des problèmes de santé urinaire»

Les chercheurs ont pu accéder de façon anonyme aux diagnostics de santé génito-urinaire et psychologique reçus à la suite d’une consultation ou d’une hospitalisation entre les années 1996 et 2013. Plusieurs variables, comme le statut socio-économique et les prédispositions individuelles à souffrir de problèmes de santé génito-urinaire avant l’agression sexuelle, ont été prises en compte. Étaient considérés comme une agression sexuelle commise sur les enfants : les attouchements et caresses, les pratiques sexuelles orales, la pénétration ou une tentative de pénétration, le voyeurisme, l’exhibitionnisme, l'incitation à des activités sexuelles et l'exploitation sexuelle (prostitution).

Les résultats révèlent que les filles qui ont été agressées sexuellement étaient plus à risque de consulter pour un plus grand nombre de catégories de troubles psychiatriques : troubles anxieux, troubles de l’humeur, schizophrénie ou abus de substances. « Cela a permis de prédire qu’il y aurait davantage de consultations et d’hospitalisations pour des problèmes de santé urinaire et génitale dans les années suivant le signalement de l'agression.», explique le Pr Pascale Vézina-Gagno, qui a mené l'étude. Les analyses ont aussi démontré que, après l’agression, plus les jeunes filles consultent ou sont hospitalisées pour troubles psychiatriques, plus elles présentent par la suite des problèmes de santé génitale.

Comment expliquer ces résultats : hypervigilance ou évitement ?

« Des études supplémentaires seront nécessaires pour voir comment d’autres variables importantes auxquelles nous n’avons pas eu accès, comme la chronicité ou la gravité de l’abus sexuel, pourraient avoir des conséquences plus marquées sur la santé génito-urinaire.», souligne la chercheuse. Les chercheurs évoquent deux types d’hypothèses pour expliquer ces résultats. La première hypothèse est l'hypervigilance : parmi les victimes, celles qui présentent des problèmes de santé mentale plus nombreux pourraient également devenir hypervigilantes ou plus à l’écoute à tout symptôme lié à leur santé génitale ou urinaire, ce qui les amènerait à consulter plus souvent un médecin.

« La deuxième hypothèse concerne l'évitement comportemental, c’est-à-dire que les victimes attendraient avant de demander de l'aide et de consulter pour les troubles génito-urinaires ou évitent de le faire, avec le risque de détérioration ou de chronicisation de ces problèmes. », expose le Pr Vézina-Gagnon. « Les soins gynécologiques pourraient rappeler à la victime la situation d'abus (disparité de pouvoir entre le médecin et le patient, retrait des vêtements, vulnérabilité et douleur potentielle) et être pénibles pour ces femmes.» Les chercheurs soulignent que ces conclusions vont dans le même sens que la littérature scientifique dans le domaine de la psychologie de la santé et de la maltraitance.

Elles mettent par ailleurs « une fois de plus en lumière l’importance de prendre en considération les liens entre le corps et l’esprit (approche holistique), entre la santé physique et psychologique dans l’accompagnement des jeunes filles dans leur processus de rétablissement. », concluent-ils. Pour les filles victimes d'une agression sexuelle et présentant des problèmes de santé génito-urinaire, il serait nécessaire d'évaluer leur niveau de détresse psychologique et de les diriger vers un service adéquat afin qu’on prenne soin de leur santé mentale. Ainsi, une intervention précoce pour réduire leur détresse psychologique pourrait prévenir la chronicisation et l'aggravation des problèmes de santé génito-urinaire.

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