Bientôt ou déjà parents, on vous accompagne !

Grâce à l’odeur de leur mère, les nourrissons voient des visages partout !

Publié le par Alexandra Bresson

Dans une récente étude, des chercheurs français montrent qu’à 4 mois, l’odeur de la mère peut même initier l’illusion d’un visage dans un objet qui, sans odeur, n’est pas perçu comme un visage.

 

Comprendre comment le cerveau du jeune nourrisson commence à catégoriser les expériences sensorielles provenant de son environnement complexe est d'un intérêt scientifique primordial. En effet, pour comprendre son environnement social, le bébé humain doit rapidement développer son aptitude à percevoir les visages. On sait que cette aptitude est encore difficile chez le nourrisson car son système visuel est encore très immature. Mais il peut compter sur un sens plus développé à la naissance, plus mature, pour guider son interprétation de l’environnement : l'odorat, vecteur de nombreuses informations sur les congénères. Oui mais comment ce processus fonctionne-t-il précisément ?

Telle est la question posée par des chercheurs du Centre des Sciences du Goût et de l’Alimentation*, dont l'étude a été publiée dans la revue scientifique PNAS. Les chercheurs rappellent que dès les premiers mois de vie, le nourrisson répond préférentiellement aux odeurs humaines, notamment maternelles, qui orientent et guident son comportement social. Mais restait à savoir si ces odeurs sont en mesure d’influencer comment le cerveau de l’enfant perçoit les visages. Lors de précédents travaux scientifiques, ces mêmes chercheurs avaient observé qu’en présence de l’odeur de sa mère, le bébé de 4 mois regarde davantage les visages que d’autres objets présentés simultanément.

Dès les premiers mois de vie, le nourrisson répond préférentiellement aux odeurs humaines, notamment maternelles, qui orientent et guident son comportement social.

Les odeurs facilitent la perception des visages

Leur étude avait également montré que le cerveau du nourrisson répond plus fortement à des visages présentés parmi d’autres objets. Cette fois, l'équipe scientifique a souhaité évaluer si l’odeur engendre directement la réponse aux visages dans le cerveau du jeune enfant. Elle a pour cela utilisé des images d’objets qui peuvent être perçus comme des visages : cette illusion visuelle est appelée paréidolie, comme lorsqu'une personne perçoit un visage dans les nuages ou la mousse du café. Une vingtaine de nourrissons de 4 mois ont été alternativement exposés à deux t-shirts, avec ou sans l’odeur de leur mère, tandis que parallèlement leur activité cérébrale était enregistrée par électroencéphalographie.

« Sur l’écran devant eux, des photographies d'objets variés se succédaient rapidement, certaines évoquant des visages. », précisent les chercheurs. « Nous avons mesuré l’émergence d’une réponse cérébrale distincte entre objets « faciaux » et objets « non-faciaux », cette réponse témoignant de la perception d’un visage illusoire dans les objets « faciaux ». Les résultats montrent que le cerveau du nourrisson répond peu aux visages illusoires quand il est exposé au t-shirt non porté. Mais lorsque l’on délivre l’odeur de la mère, l’activité cérébrale spécifique aux objets « faciaux » est amplifiée. Au niveau individuel, la majorité des bébés n'ont perçu les visages illusoires qu’en présence de l’odeur maternelle.

Ces résultats indiquent que l’odeur initie chez eux l’illusion d’un visage pour des objets qui n’étaient initialement pas perçus comme tels. Cette découverte a son importance, puisque cela montre que l'odorat est plus qu'une simple assistance à la perception visuelle : il active directement des représentations cérébrales qui façonnent la manière dont le bébé interprète son environnement.

L'odorat active directement des représentations cérébrales qui façonnent la manière dont le bébé interprète son environnement.

« Cette étude fournit la preuve que le système visuel encore immature du jeune enfant se nourrit d’informations sensorielles non visuelles comme les odeurs pour faciliter, et même façonner, la perception des visages. Plus généralement, elle illustre le rôle fondamental des interactions entre les sens pour interpréter l’environnement social. », conclut l'équipe scientifique.

*CNRS, Université Bourgogne Franche-Comté, Inrae, AgroSup Dijon

Sujets associés