Prénom : le choix des couples mixtes

Publié par Elodie-Elsy Moreau  |  Mis à jour le

Choisir un prénom se transforme parfois en  véritable casse-tête pour les parents. Et l’affaire se corse parfois davantage pour les couples mixtes. Comment les parents font-ils leur choix ?  Baptiste Coulmont, auteur de « Sociologie des prénoms » et la spécialiste des prénoms Stéphanie Rapoport nous nous livrent des éléments de réponse.

Couple mixte : le choix d’un prénom passe-partout

Le choix du prénom suscite certainement les cogitations les plus intenses des futurs parents. Et lorsque ces derniers n’ont pas la même origine ou culture, trouver la perle qui contentera aussi bien maman que papa n’est pas chose facile. « Chacun pense à sa famille. Les parents doivent choisir un prénom reconnaissable et prononçable dans les deux langues», explique Stéphanie Rapoport, qui publie chaque année « L’Officiel des prénoms ». « Sans oublier, que certains pays, comme le Maroc, contrôlent les sonorités autorisées, ce qui complique les recherches lorsque le père et la mère souhaitent donner une double nationalité  au bébé », ajoute Baptiste Coulmont. La plupart des couples mixtes choisissent donc un prénom caméléon, passe-partout comme Nora, à la fois grec et arabe ou Lina, d’origine grecque, arabe, indoue et chinoise. D’autres opteront pour Nadia, prénom arabe, latin et russe. Pour les couples franco-européens, le choix est plus facile. Beaucoup optent pour des sonorités internationales, comme les terminaisons en « a » pour les filles ou des prénoms d’origine biblique. Adam, commun aux trois religions monothéistes, et très en vogue chez les anglophones, est très plébiscité.

Par ailleurs, avec la mondialisation et Internet, la cote des prénoms dépassent les frontières. Très appréciée en France, Emma l’est également chez nos voisins italiens, suisses, espagnols et même au Québec. Quand à Lucas, prénom phare du top français, il est relativement bien attribué en Suède et en Belgique. On retrouve également sa variante Luca en Suisse et en Italie, et la version Lukas en Europe de l’est.
 

Un prénom composé multiculturel

Le prénom reflète une identité sociale, l’origine géographique et ethnoculturelle, explique Nicolas Guéguen dans son livre « Psychologie des prénoms ». En baptisant leur enfant de telle ou telle façon, les parents font donc, le plus souvent, le choix de transmettre leurs racines. Comme l’explique Baptiste Coulmont dans son livre  « La sociologie des prénoms », plusieurs études révèlent que les couples mixtes souhaitent  « insérer l’enfant dans une identité collective ». On observe donc un  «  cumul des identités » via des compositions, notamment chez les couples franco-musulmans. Pas étonnant quand on sait que les prénoms composés sont déjà très en vogue au sein des familles maghrébines. « Mohamed-Amine est premier du top des prénoms composés devant Jean-Baptiste.  Et Mohamed-Ali se place à la 3e position, explique Stéphanie Rapoport. J’ai d’ailleurs autour de moi une petite Lili-Nour. Un prénom ultra poétique, qui illustre à merveille la diversité ».
 

« Franciser » un prénom d’ailleurs ?

Par désir de neutralité, certains parents préfèrent transformer la sonorité ou l’orthographe d’un prénom afin de le « franciser ». Stéphanie Rapoport le confirme : « on remarque une forte volonté d’intégration chez les couples franco-musulmans. Car on le sait, il existe une certaine discrimination des CV nominatifs. » Voilà pourquoi certains couples mixtes opteront par exemple pour Ines, prénom espagnol, mais arabe avec un accent. Certains mélangent aussi les modes d’ici et d’ailleurs. Ainsi, avec le succès des prénoms bretons, comme Maël, on a vu l’émergence du prénom Maëlik, provenant à l’origine du prénom arabe Malik. Autre fusion marquante : Rayan. Il provient du prénom celte Ryan, très en vogue au début des années 2000 et du prénom musulman Rayane.  Par ailleurs, Jad, prénom arabe masculin, est de plus en plus attribué. En effet, on l’assimile au prénom féminin Jade, très populaire en France. Le choix du prénom : « un rapport de force » ?  Sami ou Louis ?, Kira ou Zoé ? « Opter pour un prénom plus ou moins marqué révèle l’orientation éducative voulue par le couple », précise Stéphanie Rapoport. Mais plus étonnant : pour les parents de cultures différentes, notamment franco-arabes,  le choix du prénom est surtout influencé par la catégorie sociale des parents.  Une enquête menée au début des années 1990 à Marseille, auprès de 900 couples franco-algériens, révèle qu’un bébé issu d’un père français cadre et d’une mère maghrébine sans emploi, portera un prénom hexagonal. « On entend souvent dire « on s’est mis d’accord sur le nom », mais ce choix est aussi une question de pouvoir », souligne Baptiste Coulmont. D’ailleurs, dans son livre, il le précise : « choisir un prénom, c’est choisir une lignée (maternelle ou paternelle), mais les lignées disposent d’un pouvoir inégal face à l’affirmation identitaire ».

Nul doute qu'avec tous ces paramètres, on ne trouve un prénom qui plaira aux deux parents tout en honorant leur culture !

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