Les problèmes de circulation sanguine pendant la grossesse

Publié par Isabelle Hallot  |  Mis à jour le par Hélène Bour

Pourquoi pendant la grossesse a-t-on une mauvaise circulation sanguine, et in fine davantage de problèmes circulatoires ? Y a-t-il des femmes plus à risque que d'autres ? Quand consulter ? Comment lutter contre les problèmes de circulation lorsqu'on est enceinte ? On fait le point.

Pourquoi a-t-on une mauvaise circulation sanguine enceinte ?

Sous l’influence de la progestérone, hormone secrétée au cours de la grossesse, les veines se dilatent, deviennent plus fragiles et moins élastiques. De plus, pour permettre la croissance du placenta et du fœtus, la masse sanguine s’accroît de 40 %. Résultat, nos veines ont beaucoup plus de mal à ramener le sang vers le cœur, et la pression à leur niveau augmente.

Le phénomène est aggravé par le fait que les vaisseaux du petit bassin, en particulier la veine cave inférieure, sont de plus en plus comprimés par le volume de l'utérus, notamment au troisième trimestre. Au bout du compte, la circulation sanguine dans la partie inférieure de notre corps (les jambes, mais aussi la région vulvaire et anale) a du mal à s’établir correctement.

Qui sont les personnes les plus à risque ?

Certains facteurs accélèrent le mécanisme. En premier lieu, l’hérédité, mais également les futures mamans déjà sujettes à une insuffisance veineuse et à une mauvaise circulation sanguine avant d’être enceintes. La station debout ou assise prolongée pendant de longues périodes ensuite. Les grossesses multiples sont aussi un facteur de risque, puisque le risque est de 23 % lors de la première grossesse et passe à 31 % à la quatrième grossesse. Une prise de poids trop importante et un manque d’activité physique n’arrangent rien à l’affaire.

Douleur, jambes lourdes : quels sont les symptômes ?

Au premier stade, le symptôme le plus fréquent est surtout la sensation de jambes lourdes, de crampes, de fourmillements, ou d’impatiences (sensations désagréables dans les jambes, provoquant un besoin immédiat de bouger). Après une journée assise ou à piétiner, les pieds sont très enflés. On parle d'œdème. C’est désagréable, inconfortable mais pas inquiétant, sauf si le gonflement persiste après une nuit de repos. Dans ce cas, il peut être le signe d’un problème rénal, et il faut alors en parler à son médecin.

Lorsque la dilatation des veines s’intensifie et que les petites valvules situées sur leur paroi ne fonctionnent plus bien, le sang s’accumule et des varices peuvent apparaître, parfois dès le premier trimestre. On les perçoit, car les veines forment à leur niveau une masse bleue ou pourpre un peu sinueuse sous la peau. Ces varices siègent généralement sur les jambes, mais elles peuvent aussi apparaître au niveau de la vulve (varice vulvaire) ou de l’anus (hémorroïdes).

Une complication plus rare mais aussi plus grave : la phlébite, ou thrombose veineuse. Il s'agit de la formation d'un caillot de sang dans une veine, le plus souvent au niveau des membres inférieurs, s'installant dans une veine profonde (phlébite profonde) ou superficielle (phlébite superficielle ou paraphlébite). La phlébite peut elle-même engendrer une embolie pulmonaire si le caillot migre jusqu'au poumon via la circulation sanguine. Il ne faut donc pas la prendre à la légère, et consulter très rapidement un médecin.

Enceinte, comment reconnaître une phlébite ?

La phlébite se caractérise par une douleur d’apparition soudaine, dans la jambe. Celle-ci va gonfler de façon plus ou moins importante (œdème) selon si la phlébite est profonde ou superficielle. La douleur s'associe à une sensation de lourdeur, et à une rougeur si le caillot se situe dans une veine superficielle. La peau est chaude au toucher, et de la fièvre peut apparaître. Enceinte face à ce type de symptômes, mieux vaut consulter sans tarder, dans la journée, pour éviter de graves complications.

Enceinte, comment améliorer la circulation et éviter la phlébite ?

  • Bouger !

On évite de rester debout ou assise trop longtemps ! Pour conserver une bonne circulation au niveau des jambes, on fais de l’exercice chaque jour. La marche (30 minutes par jour minimum), l’aquagym ou la natation sont excellentes.

  • De l'eau et des fibres

On mange équilibré pour éviter une prise de poids trop importante et on lutte contre la constipation qui aggrave les hémorroïdes. Au menu : 1,5 à 2 litres d’eau par jour et une alimentation riche en fibres (fruits, légumes et céréales) pour le transit.

  • Du froid plutôt que du chaud

Pas de vêtements trop serrés ou des chaussettes qui coupent la circulation. Les sources de chaleur comme le chauffage au sol, les épilations à la cire chaude, l’exposition au soleil, le sauna ou hammam, et les bains à température élevée sont à éviter. Au contraire, on termine sa douche par un jet d'eau froide sur ses jambes, ou, si on a l’occasion, on marche au bord de l’eau pour activer la circulation et favoriser le retour veineux.

  • Des bas de contention en prévention

A la maison, on surélève son matelas d’environ 10 cm et on se fait masser les mollets de bas en haut par le futur papa. Les bas de contention ou chaussettes de contention (remboursés sur prescription) peuvent s’avérer très utiles, surtout si vous envisagez de rester immobile durant plusieurs heures (voyage en voiture ou avion). Les mamans qui ont des troubles importants devront les porter jusqu’à quatre mois après l’accouchement et passer de la chaussette de contention en début de grossesse aux bas, puis au collant de contention durant le dernier trimestre.

  • D'autres mesures à prendre

Dans la journée, dès que possible, on essaye de mettre ses jambes au repos, sur un coussin par exemple. Lorsqu'on s'allonge, on se couche sur le côté opposé à celui de la varice. Envie de vous faire dorloter ? On s'offre un soin “jambes lourdes” en institut, ou des séances de kiné. Enfin, on troque ses talons aiguilles et ses spartiates pour des chaussures à petits talons (3 cm), plus confortables pour les veines.

Phyto, homéopathie : comment soulager les jambes lourdes naturellement ?

En homéopathie, la prescription type pour la femme enceinte qui souffre de problèmes de circulation et de jambes lourdes comprend généralement Hamamelis virginiana et Aesculus  hippocastanum (Marronnier d’Inde). A noter qu’il existe des mélanges de granules spécialement conçus pour les problèmes de circulation veineuse et de jambes lourdes.

Mais concernant le phénomène de jambes lourdes et plus largement l’insuffisance veineuse, c’est la phytothérapie qui est particulièrement indiquée. On pourra notamment se tourner vers des tisanes estampillées “jambes légères” ou “circulation”, faites de plantes veinotoniques telles que la vigne rouge, le petit houx, le marronnier d’Inde, l’hamamélis ou encore le ginkgo biloba.

A noter qu’il existe également en parapharmacie des sprays et gels “jambes légères” intéressants pour obtenir un effet “fraîcheur” immédiat en cas de jambes lourdes. L’idéal étant d’en profiter pour se masser les jambes des chevilles au haut de la cuisse. On peut également opter pour des compléments alimentaires à base de plantes veinotoniques, en vérifiant bien qu’ils sont compatibles avec la grossesse. En gardant toutefois en tête que ces remèdes naturels ne se substituent pas aux conseils anti-jambes lourdes ci-dessus et au port de bas de contention, dont l’efficacité est avérée.

Insuffisance veineuse : quel veinotonique pendant la grossesse ?

Si l’insuffisance veineuse est avérée et avancée, le gynécologue obstétricien ou la sage-femme qui suit la grossesse peut passer le relais à un phlébologue. Il s’agira alors de prescrire des médicaments veinotoniques compatibles avec la grossesse, en plus du port de bas de contention de catégorie 2 ou 3.

Selon le site du Centre de Référence sur les Agents Tératogènes (CRAT), ce sont les molécules phlébotoniques suivantes qui devront être utilisées préférentiellement durant la grossesse et l’allaitement, pour éviter tout risque pour le bébé :

  • Diosmine (Daflon®, Dio®, Diovenor®, Médiveine®, Vénaclar®) ;
  • Hespéridine (Daflon®, Bicirkan®, Cyclo3®) ;
  • Troxérutine (Rhéoflux®, Veinamitol®) ;
  • Rutoside (Esberiven®, Veliten®).

Rappelons que ces médicaments ne doivent être pris que sur avis médical, et que l’automédication est vivement déconseillée durant la grossesse et l’allaitement.

En vidéo : Jambes lourdes pendant la grossesse Adrien Gantois

Les problèmes circulatoires persistent-ils après la grossesse ?

Heureusement, ces problèmes veineux disparaissent spontanément trois mois après l’accouchement. Une exception toutefois : les varices préexistantes à la grossesse qui ont tendance à s’aggraver. En attendant, notre médecin pourra nous prescrire des crèmes à appliquer sur nos jambes, ou un traitement veinotonique (non remboursé).

Les hémorroïdes trop importantes ou très pénibles nécessitent parfois une petite intervention chirurgicale qui permet de libérer le surplus de sang accumulé. La sclérothérapie est contre-indiquée lors de la grossesse (sauf en cas de varices vulvaires très gênantes et douloureuses), ainsi que pendant l'allaitement. Trois mois après l'accouchement, les mamans qui le souhaitent peuvent bénéficier d’un bilan veineux et d’une prise en charge de leurs varices.

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