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Mince à tout prix pendant la grossesse

Publié par Candice Satara-Bartko  |  Mis à jour le

Sur les réseaux sociaux ou ailleurs, certaines futures mamans s'affichent avec très peu de ventre pendant la grossesse. Prendre le moins possible de poids, rester mince jusqu’à l’accouchement, une nouvelle obsession? En cause : la pression des médecins et le regard de la société, particulièrement exigeant vis-à-vis des femmes.

Kilos de la grossesse : les futures mamans de plus en plus vigilantes

Leslie est plutôt du genre bon vivant. De celles qui ne résistent jamais longtemps devant une planche de charcuterie ou un bon verre de vin. Elle fait partie de ces femmes qui mangent ce qu’elles veulent sans grossir. Pourtant, cette gourmande-née s’est mise au régime lors sa dernière grossesse. La faute d’un gynécologue pas franchement délicat. « A ma visite du 3e mois, mon médecin m’a dit “Ah mais madame, ça ne va pas du tout. Il faut faire attention. Trois kilos en un mois c'est beaucoup trop, je ne suis pas pour ce genre de grossesse” », se souvient-elle. Abasourdie, la jeune maman, qui d’ordinaire ne s’interdisait rien, fait alors très attention jusqu’à l’accouchement. Résultat : 8,5 kg au compteur, reperdus aussitôt, évidemment…

Kilos de grossesse : le discours culpabilisant de certains médecins

Ce discours injustifié assené à Leslie est loin d’être une exception. On demande aujourd’hui aux femmes enceintes de maîtriser de plus en plus leur poids. Elles se doivent de respecter un régime alimentaire très équilibré, ne pas prendre plus d’un certain nombre de kilos. On agite le spectre du diabète gestationnel et on met en garde contre les risques pour le bébé, en cas de prise de poids trop importante. Bref, loin d’être rassurant, le discours ambiant est plutôt culpabilisant. « Les médecins sont très stricts, c’est une réalité », constate Laurence Haurat, psychologue-nutritionniste. « Il faut être armé pour passer outre et faire comme on le ressent vraiment. »  Et cette pression, qui pèse sur les futures mamans, est amplifiée par la société en général. Dans les médias, sur les réseaux sociaux, les célébrités, en première ligne, prônent ce culte de la minceur, y compris pendant la grossesse, en affichant une silhouette mincissime jusqu'à leur accouchement et en retrouvant leur ligne en quelques semaines.

Kilos de la grossesse : le poids des mots…

C’est dire à quel point est révolu le temps où l’on disait qu'enceinte, il fallait manger pour deux.  Les recommandations se sont durcies : aujourd’hui, on conseille de prendre entre 9 et 12 kg pour une grossesse. Peu importe votre histoire, vos antécédents, votre nature, il vous faut rentrer dans cette satanée fourchette de prise de poids, sous peine de vous faire réprimander par le gynécologue. Le problème, c’est que ce discours moralisateur peut devenir très angoissant : « La parole du médecin pendant la grossesse, un moment où la femme est particulièrement fragile, est extrêmement lourde de sens », poursuit Laurence Haurat. Enceinte, notre sensibilité est exacerbée. S’entendre dire que l’on met en danger sa santé ou celle de notre enfant parce que l’on a abusé des crèmes glacées n’est évidemment pas sans conséquences. Pour celle qui a passé la majorité de sa vie à se restreindre et qui voit dans la grossesse la possibilité de se faire enfin plaisir, la parole du médecin peut-être particulièrement violente. Et avoir l’effet inverse…

La gynécologue-obstétricienne Véronique Cayol reconnaît que certains de ses confères vont trop loin. « Je ne fais pas trop la chasse aux kilos, parce qu’en effet je ne veux pas culpabiliser les mères », assure-t-elle. « Ce n’est pas normal de se restreindre quand on attend un bébé. » Cependant, elle reçoit de plus en plus de patientes très angoissées à l’idée de grossir. « Une future maman qui a peur de se peser ou qui est obnubilée par son poids, cela me fait aussi m’interroger. Car il peut s’agir d’une femme qui a des difficultés psychologiques préexistantes. Et dans ce cas, mieux vaut régler les problèmes avant que l’enfant naisse », ajoute-t-elle.

Une grossesse sereine

Tous les médecins ne militent donc pas pour que leurs patientes prennent le moins de poids possible. Et la future maman est encore libre de changer de gynécologue, si le sien est trop culpabilisant. Comment rester finalement sereine dans cette période de chamboulements importants ? Se dire tout d’abord qu’il n’y a pas de règle. « La prise de poids n’est pas linéaire. On peut très bien s’en tenir à une alimentation équilibrée et prendre plus que l’on avait imaginé. De même, avoir des nausées les trois premiers mois n’empêche pas toujours de grossir », observe Laurence Haurat.  En résumé, la prise de poids « normale » n’existe pas. Chaque femme réagit différemment et « doit se faire à l’idée que la mieux placée pour savoir ce qui est bien pour elle et pour son bébé, c’est elle », conclut la psychologue-nutritionniste.

Laurence Haurat a publié "Ex-fan des régimes" aux Editions de la Martinière, avec Annabelle Demouron.
Elle est également l'auteure du "Family Cook Book”, Béaba.