Endométriose et infertilité : quel est le lien, quelles sont les solutions ?

Publié par Katrin Acou-Bouaziz  |  Mis à jour le par Barbara Benattasse

En collaboration avec Chrysoula Zacharopoulou (gynécologue spécialiste de l'endométriose et députée européenne)

Quel est le lien entre endométriose et infertilité ? Quelles sont les différentes solutions possibles ? On fait le point avec Chrysoula Zacharopoulou, gynécologue spécialiste de l’endométriose et députée européenne.

L’endométriose est responsable de 30 % à 50 % des cas d’infertilité. En effet, cette maladie, qui touche au moins 10 % des femmes en âge de procréer, peut entraîner des troubles de l’ovulation, une diminution de la réserve folliculaire, ou encore des anomalies de la fécondation.

Qu’est-ce que l’endométriose ?

L’endométriose est une maladie gynécologique liée au fait que l’endomètre (le tissu qui tapisse l’utérus) ne s’évacue pas complètement pendant les règles et migre alors dans les trompes jusqu’à la cavité abdominale pour se développer hors de l’utérus et s’implanter sur différents organes du pelvis, comme les ovaires ou les trompes, voire bien plus haut. Cela entraîne l’apparition de nodules, de kystes, d’adhérences, qui peuvent perturber le fonctionnement de l’appareil génital féminin et mettre en péril la conception d’un bébé.

Des symptômes qui apparaissent parfois sur le tard

Les symptômes de l’endométriose apparaissent classiquement dès l’adolescence, lors des premières règles. Mais « certaines femmes commencent à souffrir plus tard, souvent au moment de l’arrêt de la pilule et/ou d’un désir de grossesse », explique Chrysoula Zacharopoulou, gynécologue spécialiste de l’endométriose et députée européenne.

Les douleurs, surtout dans le bas-ventre (de type crampes), s’accompagnent parfois de nausées, de fatigue et empêchent de mener une « vie normale ». Et ce pendant les règles… Ou non. Chez certaines femmes, les rapports sexuels ou le simple fait d’aller aux toilettes peuvent aussi être douloureux.

La liste des symptômes reconnus et associés à l’endométriose comporte :

  • Des dysménorrhées (douleurs pendant les règles)
  • Des dyspareunies (douleurs pendant les rapports sexuels)
  • Des dysuries (douleurs urinaires)
  • Des dyschésies (douleurs à la défécation) et autres troubles intestinaux
  • Des douleurs aux ovaires et/ou pelviennes chroniques
  • Des asthénies (fatigues anormales)
  • Des douleurs de dos et d’épaules
  • Une infertilité (insuffisance ovarienne, trompes atrophiées, obstacle à la nidation…)

Votre gynécologue pourra, après examen et interrogatoire, décider de faire pratiquer des examens complémentaires (échographie endovaginale, IRM…).

Est-ce que l’endométriose empêche d’avoir un enfant ? Peut-on tomber enceinte ?

Selon l’association Endofrance, 30 à 40 % des femmes atteintes d’endométriose souffrent aussi d’infertilité. De nombreux gynécologues encouragent alors leurs patientes atteintes d’endométriose à ne pas trop retarder leur première grossesse. L’endométriose peut en effet entraîner :

  • des troubles de l’ovulation
  • une diminution de la réserve folliculaire
  • des anomalies de la fécondation
  • des troubles de la captation ovocytaire
  • des troubles du transport des gamètes
  • un trouble de l’implantation
  • une inflammation du liquide péritonéal, perturbant la rencontre entre l’ovocyte et le spermatozoïde
  • des adhérences péri-tubo-ovariennes
  • des altérations tubaires
  • des lésions annexielles

« Dans le cas d’une infertilité, on a deux options thérapeutiques : la chirurgie et /ou l’assistance médicale à la procréation (AMP), c’est-à-dire l’insémination intra-utérine et la FIV », résume Chrysoula Zacharopoulou. On peut aussi, si cela s’avère nécessaire, recourir à un don d’ovocytes, même si cette assistance est moins concluante chez les femmes atteintes d’endométriose, et surtout d’adénomyose.

Quels sont les moyens de lutter contre l’endométriose pour tomber enceinte ? Est-ce que l’endométriose rend une opération chirurgicale nécessaire ?

Concernant la chirurgie, il y a un dissensus entre les soignants : certains assurent que la chirurgie améliore la fertilité spontanée, tandis que d’autres privilégient un traitement laparoscopique (par cœlioscopie). La chirurgie peut concerner soit toutes les lésions d’endométriose, soit seulement celles qui compliquent la prise en charge d’une assistance médicale à la procréation.

La pratique d’une kystectomie des endométriomes n’est en revanche plus recommandée aujourd’hui dans le cadre d’un désir d’enfant puisqu’elle altère la réserve ovarienne.

La spécialiste précise que le stade de l’endométriose, la sévérité de la maladie et les organes atteints, la symptomatologie et l’efficacité des traitements médicaux mis en place, l’âge de la femme, la réserve ovarienne, la perméabilité des trompes, ou encore la présence supplémentaire d’adénomyose constituent autant d’éléments à mettre ensemble pour décider de la meilleure stratégie à adopter en cas d’infertilité. Les propositions de traitement de l’infertilité varieront donc en fonction des facteurs précédemment cités.

Il est recommandé que la patiente soit accompagnée par un centre pluridisciplinaire, proposant des conseils de chirurgiens gynécologues, de radiologues et de spécialistes de l’AMP, toutes et tous formés aux particularités de l’endométriose.

Dans tous les cas, il est conseillé aux femmes atteintes d’endométriose de ne pas attendre le délai habituel d’un an ou deux ans de rapports sexuels réguliers pour consulter en l’absence de grossesse. Car l’endométriose risquerait d’évoluer et de compromettre un peu plus les chances de tomber enceinte.

Problème de fertilité : comment savoir si l’endométriose entraîne le fait d’être stérile ?

L’endométriose peut conduire à une infertilité par quatre mécanismes, parfois associés, parfois isolés, comme l’expliquent divers spécialistes, dont Charles Chapron et Yasmine Candau, auteurs de l’ouvrage « Idées reçues sur l’endométriose » (Éditions Le Cavalier Bleu).

  • Le premier mécanisme est inflammatoire :

Les lésions d’endométriose provoquent une inflammation chronique dans le bas-ventre et particulièrement dans l’utérus, qui n’est pas propice à la fécondation, à la rencontre des gamètes.

  • Le deuxième mécanisme est l’obstruction des trompes :

Les trompes de Fallope peuvent progressivement se boucher du fait de lésions d’endométriose dans les trompes, ce qui rend impossible la rencontre entre l’ovule et les spermatozoïdes, qui ne peuvent le rejoindre.

  • Le troisième mécanisme est lié à l’ovulation :

En présence de kystes endométriosiques (aussi appelés endométriomes) dans les ovaires, le bon fonctionnement de l’ovaire peut être contrarié, ce qui complique la maturation des follicules (enveloppes contenant les futurs ovules), puis le processus d’ovulation lorsqu’un follicule est mature.

  • Le quatrième mécanisme est l’altération de la réserve ovarienne :

Celui-ci a surtout lieu en présence d’endométriomes (kystes d’endométriose dans l’ovaire). Le tissu ovarien, peut, au fur et à mesure, se voir « grignoté » par le kyste, ce qui peut diminuer le stock d’ovules disponibles. Mal réalisée, une ablation d’un kyste ovarien peut aussi endommager cette réserve d’ovules, c’est pourquoi la chirurgie en présence d’un kyste ovarien est très délicate, surtout si la femme souhaite tomber enceinte.

Les gynécologues s’accordent à dire qu’une femme atteinte d’endométriose qui cumulerait les quatre mécanismes aura probablement besoin d’une assistance médicale à la procréation, là où une femme ne présentant qu’un seul mécanisme aura plus de chances de tomber enceinte naturellement, sans traitement. Mais comme un bébé se fait à deux, la fertilité du conjoint a aussi son importance, et le spermogramme de celui-ci devra être réalisé pour savoir quelle procédure choisir : se lancer directement en PMA ou tenter sa chance naturellement pendant quelques mois.

Notons par ailleurs qu’il existe un cinquième mécanisme expliquant indirectement le lien entre endométriose et infertilité, qui est d’ordre sexuel. En effet, l’endométriose engendrant potentiellement des douleurs pendant les rapports (dyspareunies), il peut être difficile d’avoir des rapports sexuels assez régulièrement pour ne pas « manquer » la période de fécondité, qui se situe durant les trois jours autour de l’ovulation.

Désir de bébé et d’enfant : une femme sur dix en âge de procréer touchée par l’endométriose

Chrysoula Zacharopoulou nuance ce chiffre : « Calculer le nombre exact des femmes touchées par cette maladie reste difficile. D’une part, il n’y a pas d’études épidémiologiques françaises. D’autre part, les patientes sont souvent sous-diagnostiquées ». Selon la gynécologue, ce chiffre serait en augmentation ces dernières années, grâce à une meilleure communication autour de la maladie, qui a permis aux femmes de mettre des mots sur leur douleur et de consulter sans crainte d’être jugées.

La spécialiste évoque notamment la première campagne nationale pour l’endométriose (« Les règles c’est naturel, pas la douleur »). « Plus le diagnostic et la prise en charge se feront tôt, plus la qualité de vie et la fertilité de la patiente pourront être améliorées », conclut la médecin.

En vidéo : Endométriose et hystérectomie : Lorie nous dit tout sans tabou

 

 

 

Oui
il y a 21 jours
Il me traumatise, même. Beaucoup de gens ne veulent pas le reconnaître, et pourtant c'est un devoir de le dire. Parce que depuis des décennies, l'é...
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Photo de profil de Clemence T
36 points
Non
il y a 2 mois
Non cela ne me choque pas. Il faut arrêter de jouer les "précieuses ridicules"! C est une expression TRÈS maladroite mais qui exprime très bien son id...
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