Punitions 2.0 : ces parents qui humilient leurs enfants sur le Web

Publié par Elodie-Elsy Moreau  |  Mis à jour le

C’est la nouvelle pratique éducative qui grimpe aux États-Unis : humilier son enfant sur les réseaux sociaux après qu’il ait fait une bêtise. Des punitions 2.0, controversées, non sans effet sur les bambins. Catherine Dumonteil-Kremer, spécialiste de l’éducation et auteure du livre « Une nouvelle autorité sans punition ni fessée », nous éclaire…

L’humiliation des enfants sur les réseaux sociaux en guise de punition

Fini les lignes, le piquet ou encore l’interdiction d’écrans pendant une durée déterminée ! A l’heure d’Internet, les parents sont passés aux punitions 2.0. En effet, aux États-Unis, ils sont de plus en plus nombreux à humilier leurs enfants qui se sont mal comportés sur les réseaux sociaux. En quoi cela consiste-t-il ? Poster une photo ou une vidéo de sa progéniture dans une situation inconfortable pour lui couper toute envie de réitérer. Et l’une des punitions les plus courantes est le rasage des cheveux ou la coupe complètement ratée, en direct. Avec, en prime, les commentaires désobligeants des parents qui tentent de justifier leur acte. Mais parfois, tout cela se termine tragiquement. En mai 2015, une jeune américaine de 13 ans s’est suicidée après que son père ait publié sur You Tube une vidéo d’elle sur laquelle il lui coupait les cheveux pour la punir. Un drame qui démontre l’impact négatif et destructeur de tels agissements. Si ce phénomène ne touche pas encore la France, il pourrait bien tenter certains parents. « Tout ce qui vient des États-Unis émerge chez nous un jour ou l’autre », indique Catherine Dumonteil-Kremer. Selon cette spécialiste de l’éducation, « poster des vidéos de son enfant dans une situation humiliante entraîne des conséquences à l’adolescence. C’est aller trop loin dans la blessure. Ces punitions sont toxiques et représentent une atteinte à la dignité. On n’en tire rien de bon ! ».

L’importance de donner le bon exemple aux enfants

Catherine Dumonteil-Kremer souligne un autre point important : les punitions ne devraient pas se retrouver sur Internet. « On partage ce qui doit rester de l’ordre de l’intime. Sans oublier que les images publiées sont parfois difficiles à supprimer. Des traces restent. Il est important de voir les choses à long terme et de donner le bon exemple », explique-t-elle. « Il ne faut pas s’étonner de voir ensuite des enfants filmer leurs parents dans des situations compromettantes et de poster ces vidéos sur Internet… ». Considérant que les adultes doivent être des modèles pour leurs enfants, Wayman Gresham, un papa américain a posté, en mai 2015, sur son compte Facebook, une vidéo allant à l’encontre de ces punitions humiliantes. On le voit s’apprêter à raser le crâne de son fils avant de s'arrêter net. Il demande ensuite à son fiston de venir l’embrasser. Il souligne également que tout au long de la vidéo, il n'a ni juré ni rabaissé son fils. En seulement quelques jours, ce post a été partagé plus de 500 000 fois.

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Punition 2.0 : un aveu de faiblesse des parents ?

 « Ces parents qui filment leurs enfants dans des positions difficiles se sentent impuissants », explique Catherine Dumonteil-Kremer. « Ils cherchent  des alternatives. C’est un aveu de faiblesse de leur part », précise-t-elle. Et cette dernière, qui s’oppose à toute forme de punition, insiste sur le fait qu’il suffit de poser les bonnes  limites et de communiquer avec son enfant pour éviter les débordements à la maison. De telles vidéos sont contre-productives. En effet, pour elle, l’essentiel est de nourrir la confiance de l’enfant et d’être à l’écoute de ses émotions. « Pour qu’un enfant intègre les bons comportements, son cerveau doit fonctionner normalement. Il a besoin de conditions optimales et d’émotions positives. Or, si on le blesse, il sera focalisé sur l’évitement et non pas sur la raison du pourquoi. Il se dira « il ne faut pas que je me fasse prendre sinon je risque d’être puni... ». Et cela peut devenir obsessionnel ». Par ailleurs, comme elle l’indique, le stress à un impact sur nos comportements. « On ne se rend pas compte, mais notre mode de vie est souvent stressant. On ne respecte pas toujours le rythme des plus jeunes. Ce qui entraîne chez eux des comportements anarchiques. Parfois, en faisait une bêtise, ils veulent juste dire à leurs parents «  occupez-vous de moi ! ». « Les enfants ont besoin davantage d’attention et de valorisation. « Il existe beaucoup d’autres outils pour se faire obéir. Et « ce n’est pas parce qu’on ne donne pas de punition qu’on ne donne pas de limites ». A méditer donc…

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