Eduquer sa fille et son garçon de la même façon, est-ce vraiment possible ?

Publié par Christine Diego  |  Mis à jour le par

Du rose pour les filles et du bleu pour les garçons. Pendant longtemps, les parents faisaient des différences dans leur éducation entre leur fille et leur garçon. Aujourd’hui, c’est le courant inverse qui domine. Pour autant, éduque-t-on de la même manière sa fille ou son garçon ?  Non, répond Angélique Cimelière, psychologue clinicienne pour enfants. Explications.

Fille ou garçon, la même éducation ?

En 2014, un rapport comprenant 30 propositions était remis à l’ancienne ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem. Il était question de favoriser l’égalité hommes-femmes, et ce, dès le plus jeune âge. De nombreux experts ont pris la parole en expliquant en quoi la lutte contre les stéréotypes de genre était essentielle dès la petite enfance. Anne-Emmanuelle Berger, spécialiste des travaux sur le genre, rappelait que les recherches sur ce sujet « n’avaient pas pour objet l'indifférenciation sexuelle mais bien le lien entre sexe biologique et stéréotypes sociaux ». Dans certaines crèches, comme à la Maison Bleue, les puéricultrices sont formées aux stéréotypes dans leur travail avec les tout-petits. Les jouets proposés aux bambins sont en général désexués, on propose aux petits garçons aussi bien de jouer à la poupée qu’aux voitures. Quand on demande aux mamans ce qu’elles en pensent, les choses sont plus tranchées. 

Inconsciemment, les parents élèvent différemment leurs enfants

Dans sa pratique de psychologue, Angélique Cimelière constate que les garçons et les filles se différencient  dès l’enfance. « En consultation, dans mon cabinet les petits gars vont vers les voitures et les fillettes sont attirées par les poupées et les vêtements. » Des mamans le confirment sur les réseaux sociaux : « Je les éduque de la même façon au quotidien mais eux ne réagissent  pas pareil. Si ma fille n'a jamais été attirée par les jeux de voiture ou de grimpette, mon fils, lui, se régale avec ce type d'activité ». Pour une autre mère de famille, c’est sûr, les garçons sont plus durs. « J'ai tenté de les élever de la même façon mais je n’ai pas réussi. Mes gars sont beaucoup plus durs que mes filles donc je n’ai pas la même éducation avec eux ».
Angélique Cimelière précise que les parents ne sont pas toujours conscients qu’ils font des différences. Pour l’histoire du soir, par exemple, ils choisiront inconsciemment un livre de T’choupi, avec une histoire différente selon qu’ils s’adressent à leur fille ou leur fils. « Cette égalité entre les deux sexes voulue et recherchée n’existe toujours pas dans notre société. Je pense que les parents éduquent différemment leur petite fille que leur garçon. Ils ne parleront pas sur le même ton par exemple à l’un ou l’autre. Ils chuchoteront plus à leur fillette et hausseront plus facilement la voix avec leur petit gars. » C’est l’avis d’une maman : « C'est certain qu'on éduque pas les filles et les garçons de la même manière, mais personne n'en est conscient ou n'ose l'admettre ». Pour la psychologue, de toute façon, même si l’enfant est élevé sans différence, c’est au moment de rentrer à l’école que tout se joue.

L’école : un lieu où naissent les stéréotypes sociaux

Même si un enfant a été élevé sans différenciation, au moment où il entrera à la grande école, au CP notamment, il adoptera des comportements très sexués et normatifs. « A l’école élémentaire, l’enfant rencontre ses pairs et prend conscience de la différence des sexes, explique Angélique Cimelière. Les filles restent avec leurs copines pour bavarder et les garçons se regroupent entre « petits mecs » pour jouer au foot ou à des jeux plutôt moteurs. » La psychologue explique que c’est le début de la socialisation et de la différenciation sexuelle. « Si un garçon est élevé dans l’indifférenciation de genre, une fois scolarisé, il risque d’être confronté à des moqueries car il a choisi un déguisement de fille par exemple. Cela peut se transformer rapidement en critiques voire en harcèlement. » En Suède, par exemple, des enfants ont été récemment scolarisés dans des établissements qui utilisaient le pronom neutre « on » au lieu de « il » ou « elle ». Angélique Cimelière n’est pas favorable à ce système. « L’enfant est nié dans son identité. Les livres proposés ne font plus références aux stéréotypes. C’est dommage, car c’est essentiel pour la construction personnelle de l’enfant. » Elle insiste sur le fait que les stéréotypes jouent bien un rôle de marqueurs sociaux importants pour le devenir de l’enfant. Elle pense qu’une majorité de parents restent assez traditionnelle dans leur éducation et, consciemment ou pas, fait des différences entre leurs fils et filles.

Eduquer ses enfants, une question de personnalité

Pour les mamans, garçons ou filles, ce qui compte c’est le caractère ou la personnalité de leur enfant. « J'ai des garçons et des filles et je les élève de la même façon en ce qui concerne la politesse, l'aide à la maison ou l’école. Ensuite, il faut composer avec le caractère de chaque enfant et s'adapter » précise une mère de famille sur Facebook. En effet, les valeurs universelles comme le respect, la politesse, l’entraide… sont transmises aux enfants sans différence. Une autre maman explique que le la personnalité de l’enfant joue un rôle primordial : « C’est une question de personnalité. On aime et on élève nos enfants différemment selon leur caractère ». Angélique Cimelière confirme aussi que les grands principes de base de l’éducation sont valables pour toute la famille chez les parents qu’elle suit en consultation. Cette maman confirme : « Je ne pense pas que cela soit le genre de l’enfant qui détermine mon éducation. La personnalité, le tempérament et les différences de chaque enfant, font que je m’adapte à chacun pour ce qu’il est. »

Sujets associés