Je me suis séparée après la naissance des jumelles

Publié par Christine Diego  |  Mis à jour le par

Sophie est la maman de Inoa et Eglantine, jumelles de 8 ans aujourd’hui. Elle est séparée de son compagnon depuis deux ans. Elle nous raconte comment elle s’est éloignée du père de ses enfants, au fil du temps.

« Mon couple n’a pas résisté à la naissance de mes jumelles… »

« J’ai appris en 2007 que j’étais enceinte. Je me souviens très bien de ce moment, ça a été violent. Quand on fait un test de grossesse, qui est positif, on pense immédiatement à une chose : on est enceinte « d’un » enfant. Donc, dans ma tête, en allant à la première échographie, j’attendais un enfant. Sauf que le radiologue nous a annoncé, au papa et moi, qu’il y avait deux bébés ! Et là, c’est le choc. Une fois en tête-à-tête, on s’est dit c’est génial, mais comment on va faire ? On s’est posé des tas de questions : changer de voiture, l’appartement, comment on allait gérer deux bambins… Toutes les idées de départ, quand on imagine qu’on va avoir un seul enfant, sont tombées à l’eau. J’étais quand même assez inquiète, il fallait acheter une poussette double, au travail, qu’est-ce que mes supérieurs allaient dire… J’ai tout de suite pensé à l’organisation pratique du quotidien et à l’accueil des enfants.

Un accouchement et un retour à la maison réussis

A l’évidence, avec le père, on s’est rendu compte assez rapidement que notre cadre de vie à deux ne collait pas avec l’arrivée de jumeaux. En plus de ça, pendant la grossesse, il m’est arrivé quelque chose de fort : j’angoissais beaucoup car je ne sentais pas bouger un des bébés. J’ai cru à une mort in utero pour l’un des deux, ça a été terrible. Heureusement, lorsqu’on attend des jumeaux, on est suivie très régulièrement, les échographies sont très rapprochées. Cela me rassurait énormément. Le père était très présent, il m’accompagnait à chaque fois. Puis Inoa et Eglantine sont nées, j’ai accouché à 35 semaines et 5 jours. Tout s’est très bien passé. Le papa était là, impliqué, même si l’intimité n’était pas au rendez-vous à la maternité. Il y a beaucoup de monde pendant et après l’accouchement quand on accouche de jumeaux.
De retour à la maison, tout était prêt pour accueillir les bébés : les lits, les chambres, les biberons, le matériel et l’équipement. Le papa travaillait peu, il était présent avec nous le premier mois. Il m’aidait beaucoup, il gérait plus la logistique, comme les courses, les repas, il était plus dans l’organisation, peu dans le maternage des petites. Comme je faisais un nourrissage mixte, allaitement et biberon, il donnait le bib la nuit, se levait, je pouvais ainsi me reposer.

Plus de libido

Assez vite, un gros problème a commencé à peser sur le couple, c’est mon absence de libido. J’avais pris 37 kg pendant la grossesse. Je ne reconnaissais plus mon corps, surtout mon ventre. J’ai gardé longtemps les traces de mon ventre de femme enceinte, six mois au moins. En clair, j’avais perdu confiance en moi, en tant que femme, et sexuellement avec le père des enfants. Je me suis détachée petit à petit de la sexualité. Pendant les neuf premiers mois, il ne s'est rien passé dans notre vie intime. Puis, on a repris une sexualité, mais elle était différente. J’étais complexée, j’avais eu une épisiotomie, cela m’a bloqué sexuellement. Le père a commencé à me faire des reproches à ce sujet. De mon côté, je ne trouvais pas les mots justes pour lui expliquer mon problème. En fait, j’avais plus de reproches que d’accompagnement et de compréhension de sa part. Ensuite, tant bien que mal, on a eu une période sympa, notamment quand on s’éloignait de la maison, qu’on allait à la campagne. Dès qu’on était ailleurs, à l’extérieur de la maison, et surtout du quotidien, on se retrouvait tous les deux. On avait l’esprit plus libre, on revivait des choses physiquement plus facilement. Malgré tout, la période de reproches à mon égard a joué sur notre relation. Il était frustré en tant qu’homme et de mon côté, j’étais concentrée sur mon rôle de maman. C’est vrai, j’étais très investie en tant que mère avec mes filles. Mais mon couple n’était plus ma priorité. Il y a eu un éloignement entre le père et moi, d’autant plus que je me sentais très fatiguée, je travaillais à l’époque dans un secteur très stressant. Avec le recul, je m’aperçois que je n’ai jamais baissé les bras dans mon rôle de femme active, de mère, je menais tout de front. Mais c’était au détriment de mon rôle de femme. Je ne ressentais plus d’intérêt pour ma vie de couple. J’étais focalisée sur mon rôle de mère accomplie et mon travail. Je ne parlais plus que de ça. Et comme on ne peut pas être au top dans tous les domaines, j’ai sacrifié ma vie de femme. Je voyais plus ou moins ce qui se passait. Certaines habitudes s’installaient, on n’avait plus de vie de couple. Il m’alertait sur nos problèmes intimes, il était en manque sexuellement. Mais je ne m’intéressais plus à ces propos ni à la sexualité en général.

J'ai fait un burn-out

En 2011, j’ai dû subir une IVG, suite à un début de grossesse « accidentel ». On a décidé de ne pas le garder, vu ce qu’on vivait avec les jumelles. A partir de là, je n’ai plus voulu avoir de rapports sexuels, pour moi cela voulait obligatoirement dire “tomber enceinte”. En prime, le retour au travail a aussi joué dans l’éloignement du couple. Le matin je me levais à 6 h. Je me préparais avant de réveiller les filles. Je m’occupais de gérer le cahier d’échange avec la nounou et le père au sujet des enfants, je préparais même à l’avance le dîner pour que la nourrice ne s’occupe que du bain des filles et les fasse manger avant mon retour. Ensuite à 8 h 30, départ pour la crèche ou l’école, et à 9 h 15, j’arrivais au bureau. Je rentrais le soir vers 19 h 30. A 20 h, en général, les filles étaient couchées, et on dînait avec le père vers 20 h 30. Au final, à 22 h 30, dernier délai, je tombais de sommeil et allais me coucher. C’était mon rythme au quotidien, jusqu’en 2014, l’année où j’ai fait un burn-out. Je me suis effondrée un soir en rentrant du travail, épuisée, à bout de souffle de ce rythme fou entre vie pro et perso. J’ai fait un long arrêt maladie, puis j’ai quitté ma société et je suis encore dans une période sans travail actuellement. Je prends mon temps pour réfléchir aux événements passés des trois dernières années.  Aujourd’hui, je pense que ce qui m’a le plus manqué dans mon couple, ce sont des choses assez simples au final : de la tendresse, de l’aide au quotidien, du soutien aussi de la part du père. Des encouragements, des mots comme « ne t’inquiète pas, ça va s’arranger, on va y arriver ». Ou alors qu’il me prenne par la main, qu’il me dise « je suis là, tu es belle, je t’aime », plus souvent. Au lieu de ça, il me renvoyait toujours à l’image de ce nouveau corps, à mes kilos en trop, il me comparait à d’autres femmes, qui après avoir eu des enfants, étaient restées féminines et minces. Mais finalement, je pense que j’avais perdu confiance en lui, je le croyais responsable. J’aurais peut-être dû voir un psy à ce moment-là, ne pas attendre le burn-out. Je n’avais personne à qui en parler, mes questionnements étaient toujours en suspens. Au final, c’est comme si le temps nous a désunis, j’en suis responsable, lui aussi, on a chacun notre part de responsabilité, pour des raisons différentes.

Au final, j’en arrive à penser que c’est merveilleux d’avoir les filles, des jumelles, mais très dur également. Le couple doit vraiment être fort, solide pour traverser cela. Et surtout que chacun accepte le chamboulement physique, hormonal et psychologique que cela représente ».

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