Enfant né prématuré : quel suivi médical après la néonatologie ?

Publié par Candice Satara-Bartko  |  Mis à jour le par Marion Bellal

Prématurés : quel suivi médical est nécessaire après la néonatologie ? Qu'est-ce que la notion d'âge corrigé ? Vers qui se tourner pour le suivi d'un enfant né prématuré ? On fait le point.

Près de 180 bébés naissent prématurément chaque jour en France, un chiffre en hausse chaque année. Si le premier combat pour les équipes médicales est de maintenir ces enfants en vie, un autre défi, de taille, s’impose très vite : le suivi sur le long terme de ces enfants nés trop tôt.

Quand mon bébé prématuré n'est plus en néonatologie : comment se passe le retour à la maison ?

La majorité des prématurés survivant à la période néonatale se développent bien. Mais ce n’est pas le cas pour tous. Plus petits, plus fragiles… Pour décider d'un retour à la maison, l'équipe soignante prendra en compte : 

  • le poids de bébé, entre 2 et 3 kg, selon son état de santé ;
  • sa capacité à prendre de 15 à 30 g par jour ; 
  • sa maturité respiratoire ;
  • sa capacité à pouvoir boire au sein ou au biberon.

La période d'adaptation à la maison peut s'avérer délicate, pour bébé comme pour ses parents. Vous aurez besoin de nombreux conseils, notamment sur l'alimentation de votre nourrisson, sur son sommeil et sur la pratique du peau à peau, voire de la méthode kangourou. Si certains n'auront besoin d'aucun suivi médical particulier, d'autres peuvent rencontrer des difficultés spécifiques. Encore très vulnérables sur le plan pulmonaire, ils sont également plus sensibles aux infections en tout genre. Sur le plan du développement, les prématurés ont la plupart du temps du retard dans les différentes acquisitions (position assise, marche, langage), comparé aux enfants nés à terme. D’autres séquelles peuvent apparaître plus tardivement.

« Au moment de la scolarisation, on peut découvrir des troubles de l’apprentissage, du comportement ou émotionnels, alors même que tous les examens étaient jusque là rassurants », constate Corinne Chantegret, pédiatre et néonatologue, responsable de la consultation de suivi des grands prématurés au CHU Dijon. D’où l’intérêt d’un suivi adapté aux besoins de chacun et, surtout, prolongé dans le temps. N'hésitez donc pas, en tant que parents, à échanger avec les soignants spécialisés qui entourent bébé, et à consulter si vous en ressentez le besoin.

Stade de prématurité (moyen, grand, très grand) : zoom sur la notion d'âge "corrigé"

La prématurité concerne tous les enfants nés avant la 37e semaine d’aménorrhée (SA). Soit quatre semaines avant la date d’accouchement théorique. Plus l’accouchement survient tôt dans la grossesse, plus la survie de l'enfant est incertaine et plus les conséquences de cette naissance précoce peuvent être importantes et irrémédiables. On distingue trois niveaux de prématurité.

Les très grands prématurés

Quand un enfant naît avant la 28e semaine d’aménorrhée, on parle de très grande prématurité. À ce stade de la grossesse, le fœtus est loin d’être définitivement formé. Les équipes médicales ne peuvent se prononcer sur sa survie. Une seule certitude : plus le bébé est gros (s’il approche les 1 000 g), plus il est viable. L’enfant sera transféré dans une maternité de type III, équipée d’un service de réanimation et de néonatalogie. Placé en soins intensifs, dans une couveuse, l’enjeu est de permettre au bébé de poursuivre son développement, en essayant au mieux de recréer les conditions de l’utérus.

Les grands prématurés

Dans cette catégorie rentrent tous les bébés mis au monde entre la 28e et la 33e SA. 90 % des enfants nés vivants survivent, mais les risques de séquelles restent importants. Tout comme les très grands prématurés, ces bébés sont sous très grande surveillance, dans un service de néonatalogie et sous couveuse pour permettre au mieux la maturité de leurs fonctions vitales.

Les prématurés moyens

Ils sont nés après la 34e semaine d’aménorrhée et avant la 37e. On parle toujours de prématurité, mais le fœtus à ce stade est bien mieux paré pour affronter le monde extérieur, que dans les deux précédents cas. Le nourrisson bénéficie de l’attention particulière de l’équipe médicale, mais il est rarement placé en couveuse.

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L'âge corrigé : comment le calculer ?

Puis, jusqu'aux deux ans de l'enfant, deux notions d'âge cohabitent : celle d'âge civil, qui se base sur la date de naissance de l'enfant, et celle d'âge "corrigé", qui prend en compte la prématurité. Avec cette dernière, par exemple, on considère qu'un bébé né prématuré à 7 mois de grossesse a 10 mois en "âge corrigé" lorsqu'il fête ses 12 mois d'âge civil. Il faut donc "comparer ce qui est comparable", et prendre en compte l'âge corrigé plutôt que l'âge civil pour juger de son développement psychomoteur, du langage, de son alimentation etc.

Après l'accouchement d'un nourrisson prématuré : une prise en charge médicale structurée et prolongée

Actuellement, le suivi médical est coordonné au niveau régional par les réseaux de périnatalité. Il est réparti entre différents acteurs : le ou la pédiatre hospitalier, la Protection maternelle et infantile (PMI) et le Centre d’action médico-social précoce (CAMSP). L’enfant est suivi par un.e médecin référent.e, le plus souvent un.e pédiatre du service de néonatologie, dès la sortie de la maternité. Les consultations ont lieu tous les deux à quatre mois au cours des deux premières années, puis tous les ans jusqu’à la 6e année. La durée est variable selon l’état de santé de l’enfant.

Ces consultations sont destinées à surveiller le développement psychomoteur de l’ancien prématuré et à repérer d’éventuelles déficiences. Toutefois, elles ne remplacent pas les consultations classiques avec votre pédiatre de ville. Les familles peuvent également s’appuyer sur la PMI, qui est informée de la sortie de l’enfant. Le suivi médical ne s’adresse, en théorie, qu’aux grands prématurés, c'est-à-dire les bébés nés avant 32 semaines d’aménorrhée, mais il peut être proposé à un enfant né plus tard et ayant rencontré des difficultés en néonatologie.

Le réseau des CAMSP : définition

Les centres d’action médico-social précoce (CAMSP) sont chargés de la prise en charge des problématiques de handicap chez les enfants âgés de 0 à 6 ans. Souvent rattachés à des maternités de niveaux III, ces organismes accueillent des enfants prématurés, en priorité les plus fragiles. La particularité de ces structures est que la prise en charge est globale et pluridisciplinaire. Chaque enfant a la possibilité d’être suivi par plusieurs professionnels (pédiatres, psychomotriciens, kinésithérapeutes, pédopsychiatres, puéricultrices…), chacun habilité à intervenir en neurologie du développement.

Plus on agit tôt, mieux on limite les séquelles, encourage Dr Valleur-Masson

« On privilégie aujourd’hui un dépistage de plus en plus précoce, afin de mettre en place sans tarder des actions ciblés, souligne Danielle Valleur-Masson, pédiatre directrice du CAMSP de l’Institut de puériculture de Paris (IPP). C’est un fait : plus on agit tôt, mieux on limite les séquelles. »

Ce travail est fait en collaboration étroite avec les familles. Les parents peuvent être reçus dès la sortie de néonatologie pour un premier dépistage. Lorsqu’un diagnostic de déficience est posé, les équipes du CAMSP proposent alors une prise en charge spécifique. Certains enfants bénéficient de deux à trois consultations par semaine, jusqu’à leur 6 ans.

Un suivi encore inégal au regard des recommandations

Le vaste rapport Europeristat, publié en 2015, a pointé les carences de la politique périnatale en France. Force est de constater que la prise en charge de la prématurité n’échappe pas à la règle… Malgré la bonne volonté des professionnels, le suivi des enfants prématurés reste encore insuffisant et est très inégal selon les régions.

« Certaines familles passent à travers les mailles du filet et se retrouvent à nous demander de l’aide parce qu’elles n’ont vu personne et que leur enfant de 2 ans ne va pas bien », déplore Charlotte Bouvard, Présidente de l’association SOS Préma. À travers le Collectif prématurité, elle milite pour une harmonisation du suivi sur le long terme des enfants nés prématurément et, plus largement, des aides accordées aux parents. Le manque de moyens et la pénurie de professionnels expliquent en partie ces défaillances. Dans les CAMSP, les listes d’attente ne cessent de s'allonger.

« Nous sommes en sous-effectifs, alerte Dr Valleur.Une fois le premier bilan de dépistage passé, les familles doivent souvent patienter pour avoir une consultation avec un.e spécialiste. Ce n’est pas facile pour elles. » Afin de pallier ces faiblesses, les parents peuvent être orientés vers des professionnels du secteur privé. Mais le prix n’est pas le même. Par ailleurs, une consultation avec un.e psychomotricien.ne n’est, par exemple, pas prise en charge par l'Assurance maladie.

En vidéo : REPORTAGE | Au coeur d'un service néonatalogie

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