Les bons réflexes pour éviter les régurgitations de bébé

Publié par Christine Avellan  |  Mis à jour le par Hélène Bour

Recracher un peu de lait après la tétée, c’est courant et même bénin. Mais trop souvent, on donne aux tout-petits des médicaments pour soulager les régurgitations, alors que des simples gestes pourraient souvent suffire. Explications. 

Pourquoi bébé régurgite-t-il ?

Déjà en 2011, une étude française révélait que chez les moins d’un an, 80 % des prescriptions pour reflux gastro-œsophagien n’étaient pas justifiées. Malgré cette sonnette d’alarme, la situation est aujourd’hui toujours la même.

Reflux du nourrisson : pourquoi cette surmédicalisation ?

D’abord parce que chez les bébés de moins d’un an, il n’est pas facile de différencier un reflux physiologique d’un reflux pathologique. En effet, avoir des régurgitations de lait après la tétée est quasi inévitable : 80 % des moins de 6 mois en ont plusieurs fois par jour. A cet âge, cela s’explique par l’immaturité de leur système digestif. Plus précisément, parce que le petit clapet situé en bas de l’œsophage ne fonctionne pas encore correctement. Conséquence, lorsque l’enfant avale une grande quantité de lait, la pression dans l’estomac augmente, avec des risques de remontées dans l’œsophage. Le trop-plein de lait est alors recraché… sur le bavoir. Le plus souvent, ces rejets ont lieu dans la journée et ne sont pas très abondants.

Différencier le reflux banal, du RGO pathologique

Bien que désagréable, ce reflux gastro-œsophagien (RGO) physiologique est sans danger et sans risque de complications. Mais il existe aussi un RGO dit pathologique. Plus rare, il concerne en particulier les prématurés ou les enfants souffrant de malformations du système digestif. Là, un traitement est nécessaire, voire, dans des cas exceptionnels, une chirurgie. Il n’est pas toujours facile de différencier ces deux reflux, car les symptômes sont très ressemblants. Ce qui les oppose : la douleur ressentie ou non lors des régurgitations. Dans un reflux banal, les régurgitations ne sont pas douloureuses, alors que dans un reflux pathologique, les remontées acides irritent l’œsophage et provoquent une sensation de brûlure. Et comme le bébé est incapable de donner les raisons de son inconfort, il est difficile de faire la part des choses. Bien sûr, les parents vont remarquer si leur enfant est gêné ou pleure quand il régurgite. Mais, là encore, comment être sûr qu’il grimace à cause des remontées gastriques acides ou à cause de coliques, par exemple ? Du coup, on a tendance à mettre sur le compte du reflux les pleurs, les troubles de l’alimentation ou du sommeil. Et la tentation est grande de prescrire des médicaments pour soulager les bébés.

Comment détecter et soulager un RGO pathologique ?

Les techniques pour vérifier la présence d’un RGO pathologique sont particulièrement invasives. Il s’agit d’examens comme la fibroscopie – on introduit une caméra dans l’œsophage pour vérifier la présence d’ulcères. Ou la pHmétrie : l’enfant doit porter une sonde pendant 24 heures pour quantifier le reflux. Donc, « pas question de réaliser ces examens sur tous les bébés qui ont des régurgitations et pour qui l’on suspecte un RGO pathologique ! », assure le Pr Frédéric Gottrand.

Résultat, par précaution et parfois sous la pression des parents – un quart des bébés régurgitent plus de cinq fois par jour – les médecins ont tendance à prescrire des médicaments. Le hic : ces traitements n’ont pas tous prouvé leur efficacité et peuvent parfois être potentiellement dangereux.

Ainsi, les pansements gastriques sont le plus souvent prescrits chez les moins d’un an. « S’ils ont le mérite de soulager les bébés en calmant les sensations de brûlure dues aux remontées acides, ces médicaments ne traitent pas la cause des régurgitations », insiste le médecin.

Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP)

De même, les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) permettent de traiter l’acidité des remontées gastriques et donc de soigner l’œsophagite (inflammation de l’œsophage). Mais attention, ils n’empêchent pas non plus le RGO. « Généralement, le bébé est soulagé au bout de quatre jours, ajoute le Pr Gottrand. S’il n’y a pas d’amélioration après deux ou trois semaines, il faut envisager d’autres causes aux régurgitations, comme une intolérance aux protéines de lait ou des coliques, par exemple. » Car si les IPP sont très bien tolérés à court terme, ils ont en revanche de nombreux effets secondaires quand ils sont utilisés longtemps. « Ils peuvent entraîner des diarrhées ou des pneumonies », précise le médecin.

Les prokinétiques

A côté des IPP, on trouve aussi les prokinétiques. Donnés 15 minutes avant les repas, ils stimulent le tonus de l’anneau musculeux qui ferme le passage du bas-œsophage à l’estomac (le sphincter). Ils limitent les reflux en accélérant la vidange de l’estomac et en réduisant les remontées du liquide gastrique dans l’œsophage. Le problème : « Le seul à être encore prescrit chez les moins d’un an (Motilium) n’a pas fait la preuve de son efficacité, et les deux autres médicaments traditionnellement utilisés et potentiellement efficaces ont été soit retirés du marché (Prépulsid), soit déconseillés chez les tout-petits (Primperan) », explique le Pr Gottrand. Il est alors tentant de se demander pourquoi prendre le risque de prescrire autant de médicaments. Alors que souvent, de simples mesures suffisent.

Comment éviter que bébé régurgite ?

Une tétine anti-reflux et des temps de pause

Tout d’abord, si votre bébé avale trop d’air pendant la tétée, il a plus de chances d’avoir des régurgitations. Vérifiez donc que l’orifice de la tétine est adapté à son âge et inclinez correctement le biberon pour qu’il n’y ait pas trop d’air à l’intérieur. Autre facteur de risque : si votre enfant boit trop vite. Pour calmer les bébés gloutons, il est conseillé de faire une pause au milieu du biberon ou de fractionner les repas. « Il faut aussi éviter les couches et les vêtements qui compriment trop son ventre », conseille le médecin.

Privilégier la position assise

De même, pour limiter les pressions sur l’estomac, n’installez pas votre enfant dans une chaise haute tant qu’il ne tient pas assis tout seul – généralement vers 6 mois. Ensuite, pas question de le coucher tout de suite après la tétée : attendez au moins 30 minutes, le temps que la digestion se fasse. Vous pouvez l’installer dans un transat en position semi-verticale. « En revanche, surélever son matelas n’est pas efficace », note le Pr Frédéric Gottrand.

Mettre de l'épaississant dans le lait infantile

Un lait infantile épaissi à la farine de caroube ou à base d’amidon est parfois recommandé : demandez conseil à votre médecin. Rassurez-vous, dans la majorité des cas, les symptômes du RGO tendent à diminuer voire à disparaître avec la diversification alimentaire, quand l’enfant commence à manger solide et lorsqu’il se met à marcher. Ainsi, à 18 mois, 85 % des tout-petits n’ont plus de régurgitations.

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