Jumeaux siamois (ou conjoints) : de quoi s’agit-il et pourquoi cela arrive-t-il ?

Publié le par Manon Duran

Les siamois sont des jumeaux dont la division cellulaire a été incomplète. Leur espérance de vie varie en fonction de leurs organes communs. D'où vient cette malformation ? Que deviennent les enfants concernés ?  Zoom sur cette malformation qui survient au stade embryonnaire. 

Les enfants siamois fascinent, autant qu'ils inquiètent. Soudés au niveau d'une partie de leur corps, ils sont sujets à une malformation survenue au stade du développement des embryons dans le ventre de la mère. Que s'est-il passé ? Peut-on diagnostiquer cette situation lors de la grossesse Est-ce toujours possible de recourir à la chirurgie ? On fait le point. 

Frères et sœurs siamois(es) : qu'est-ce que cela signifie ?

Les siamois sont forcément jumeaux, ou jumelles. Ils n'ont pas pu se détacher complètement pendant leur développement embryonnaire et sont réunis par une partie de leur corps. Ce phénomène se produit uniquement dans le cadre d'une grossesse gémellaire monochoriale monoamniotique.

Autrement dit, les deux fœtus sont issus du même spermatozoïde et du même ovule. Ils partagent le même sac amniotique et un placenta unique, mais les cellules qui devaient se diviser ont tardé à le faire, contrairement à celles de "vrais" jumeaux (jumeaux monozygotes). Les embryons se développent alors en partageant un ou plusieurs organes.

Il ne s'agit donc pas d'une anomalie génétique, mais bien d'une erreur de développement embryonnaire : l'œuf initial ne s'est pas séparé entièrement dans l'utérus de la mère. Le diagnostic peut être posé par échographie dès le début de la grossesse. 

Bon à savoir : pourquoi parle-t-ton de "siamois" ? 

Les jumeaux conjoints sont dits "siamois" depuis le XIXème siècle. Cette appellation est liée à deux célèbres frères : Chang et Eng Bunker, nés en 1811 au Siam (la Thaïlande actuelle). Soudés par un cartilage latéral au niveau de la poitrine et du ventre, ces jumeaux ont mis à profil leur particularité pour devenir célèbres et partir s'installer en Caroline du Nord (Amérique). Ils sont aussi connus pour avoir eu vingt-et-un enfants avec deux femmes différentes. Leur décès, survenu en 1874, a été attribué à une pneumonie, contractée par Chang qui l’a transmise à son frère. Leurs décès respectifs sont toutefois intervenus à trois heures d'intervalle. En surprenant plus d'un. Le terme "siamois" fait donc référence au pays d'origine de ces deux célébrités.

Il existe plusieurs types d'enfants siamois

Les jumeaux et jumelles siamois(es) sont classés en fonction de la partie anatomique qui les relie. On distingue notamment les jumeaux siamois symétriques et asymétriques. 

Les jumeaux siamois symétriques :

  • les jumeaux thoracopages, unis au niveau du thorax (les plus fréquents), 
  • les jumeaux rachipages, unis au niveau du dos (les plus rares),
  • les jumeaux pycopages, unis au niveau de la partie inférieure du bassin (coccyx, périnée, sacrum, etc),
  • les jumeaux céphalopages, unis au niveau de la tête
  • et les jumeaux craniopages, qui ont une boîte crânienne commune.

Les jumeaux siamois asymétriques :

Dans le cas de jumeaux siamois asymétriques : l'un des deux embryons est plus faible que l'autre et compte que son jumeau pour survivre. 

Dans certains cas, à sa naissance, le jumeau viable présente une excroissance externe, comme un vestige de son jumeau parasite mort, car il n'a pas développé de cœur ou de cerveau. On parle alors de jumeaux ectoparasites (une partie du jumeau parasite est visible de l'extérieur, un troisième bout de bras par exemple) ou endoparasites (le jumeau parasite défectueux se situe à l'intérieur du jumeau viable). 

Combien de grossesses sont concernées ?

Les naissances de siamois sont rares. On estime qu'une grossesse sur 50 000 à 100 000 dans le monde est concernée. La plupart des embryons ne survivent pas jusqu'à la naissance, du fait des malformations qu'engendre le partage d'organes. 

Par ailleurs, la généralisation des échographies pré-natale à l'échelle mondiale entraîne de nombreuses interruptions volontaires de grossesse, surtout lorsque les chances de survie sont jugées trop faibles. Leur fréquence 

À noter : si l'on se fie à la littérature médicale, la majorité des enfants conjoints qui survivent sont des filles (75 % à 90 % selon les sources). Le premier cas de jumeaux siamois bien documenté est d'ailleurs celui des sœurs Chulkhurst, surnommées les demoiselles de Biddenden, au douzième siècle. Eliza et Mary étaient unies par l’épaule et la hanche. Elles ont vécu pendant 34 ans et sont mortes à six heures d’intervalle.

 

Quelle est la cause des jumeaux et jumelles siamois(e) ?

Personne ne sait aujourd'hui expliquer pourquoi la division cellulaire ne s'effectue pas toujours entièrement. L’hypothèse la plus explorée mentionne une fusion entre l'ovule et le spermatozoïde qui, en conséquence, entraîne le retard de la division du disque embryonnaire pendant les premières semaines de vie.

Peuvent-ils être séparés ? Comment se passe la séparation ?

La séparation de jumeaux siamois est possible, mais pas systématique. Trois scénarios sont envisageables : une séparation chirurgicale imminente (très tôt après la naissance), une séparation chirurgicale retardée (quelques années après la naissance), ou aucune séparation.

La toute première intervention chirurgicale de bébés siamois a été réalisée avec succès par Johannes Fatio au dix-septième siècle, à Bâle en Suisse. Il s'agissait de jumeaux fusionnés par l’ombilic. Le médecin a ligaturé de façon séparée les vaisseaux ombilicaux et ensuite le pont qui reliait les deux jumeaux, afin de le sectionner. Après que les ligatures fussent tombées le neuvième jour, les deux enfants ont survécu. Ce cas fut répertorié en 1689 par Emanuel König. 

Chaque opération est précédée de nombreux examens permettant de déterminer les organes complets, partiels ou manquants chez chacun. Pour pouvoir séparer des siamois, il faut effectivement qu'ils soient en bonne santé, mais aussi que leurs organes essentiels soient présents en double et que leurs organes en commun soient divisibles. Il s'agit d'une opération très délicate, tant sur le plan technique que sur le plan étique. C'est pourquoi il convient de bien évaluer le rapport bénéfices / risques au sein d'équipes pluridisciplinaires, en concertation avec les parents. Il s'agit toujours d'opérations difficiles, lourdes, longues et risquées. 

Dans certains cas, les enfants sont séparés pour permettre la survie d'un seul d'entre eux, l'autre étant considéré comme trop faible pour survivre, ou mourant. 

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