Comment décrypter les courbes de croissance pour s’assurer que bébé grandit bien ?

Publié par Gaëlle Guitard  |  Mis à jour le par Marion Bellal

En collaboration avec Céline Chaverot (Sage-femme et professeure à Lyon)

On sait où les trouver dans le carnet de santé de bébé, mais on a souvent du mal à les interpréter. Comment faut-il lire les courbes de croissance ? Les conseils de Céline Chaverot, sage-femme et professeure en sciences médico-sociales, et d’Anne-Claire Drummond, infirmière-puéricultrice.

Dès le premier jour de vie de bébé, sa taille et son poids sont inscrits dans son carnet de santé. Périmètre crânien, taille et poids vont être mesurés très régulièrement le premier mois et lors de chaque visite chez le pédiatre pendant la première année. Lors de ces visites, constater que bébé est en haut ou en bas de la courbe de croissance est souvent synonyme d’angoisse pour les parents.

Céline Chaverot, sage-femme, et Anne-Claire Drummond, infirmière puéricultrice, habituées à décrypter les courbes de leurs propres enfants et de ceux des autres, nous expliquent comment bien les lire. Histoire de ne pas se faire des cheveux blancs !

À quoi servent les courbes de croissance du carnet de santé ?

Poids, taille et périmètre crânien de bébé

Le carnet de santé délivré à la naissance de chaque bébé compte plusieurs pages consacrées aux courbes de croissance. Celles-ci fournissent des informations capitales pour suivre l’évolution de l’enfant depuis sa naissance. Elles offrent des points de repère, des références pour situer son enfant par rapport à une moyenne calculée par l’OMS (Organisation mondiale de la Santé).

La première courbe, en début de carnet, est conçue pour suivre l’évolution du poids de bébé le tout premier mois. Les autres courbes de croissance, situées vers la fin du carnet, permettent de suivre la croissance de l’enfant, de la naissance à ses 18 ans.

Objectif premier : Vérifier que la croissance se situe dans la norme, grâce à l’analyse conjointe de plusieurs données : taille, poids, périmètre crânien.

Détecter des anomalies : l’importance de la courbe du périmètre crânien

Ces courbes permettent aussi de faire un dépistage précoce d’éventuelles anomalies, que ce soit au niveau du poids ou de la taille. Sans oublier le périmètre crânien, qui intéresse en général beaucoup moins les parents. Or, évaluer sa croissance est capital, car cela permet de détecter les microcéphalies, à savoir une taille de crâne très petite, pouvant indiquer une infection maternelle avant la naissance et de potentielles séquelles chez l’enfant.

À l’inverse, un périmètre crânien qui grandit soudainement peut être le signe d’un saignement intracrânien ou de masses dans le cerveau.

Mieux évaluer la croissance des filles et des garçons entre 0 et 18 ans grâce aux nouvelles courbes

Depuis 2018, les anciennes courbes de croissance ont laissé la place à de nouvelles courbes de référence. Il faut dire que les anciennes courbes françaises dataient de… 1979 ! Et avaient été établies en fonction d’une étude sur une centaine d’enfants seulement. Les nouvelles, elles, ont été proposées par l’OMS à partir de 5 millions de mesures sur des enfants âgés de 0 à 18 ans.

Filles et garçons avaient déjà des courbes distinctes pour mesurer l’évolution de leur taille et de leur poids, ainsi que celle de leur corpulence grâce au calcul de l’IMC (Indice de masse corporelle).

L’intérêt majeur de ces nouvelles courbes

Actualisées par des chercheurs de l’Inserm et du Centre de Recherche Épidémiologie et Statistiques de la Sorbonne, les nouvelles courbes prennent en compte les changements morphologiques dans la population française et l’évolution de nos enfants ces dernières décennies. « Les enfants d’aujourd’hui sont plus grands et plus costauds que dans les années 70, note Anne-Claire Drummond, infirmière-puéricultrice. Il était temps de modifier ces courbes pour intégrer ces changements. »

Ces nouvelles courbes de croissance permettent ainsi de détecter plus précisément d’éventuelles anomalies. Et plus tôt elles sont repérées, plus vite on peut les corriger ! Par exemple, en contrôlant l’alimentation de notre bébé, pour qu’il puisse notamment rattraper son retard.

Ce qui a changé rapport aux anciennes courbes

  • Valeurs de références : les nouvelles se situent nettement au-dessus pour la taille et le poids, que ce soit chez les filles ou chez les garçons. Par exemple, dans les courbes précédentes, à 10 ans, la valeur médiane pour la taille des filles était de 134,7 centimètres, contre 139,5 centimètres désormais.
  • Le repérage du surpoids et de l’obésité ne passe plus uniquement par la courbe de poids, mais doit reposer sur le suivi régulier de la courbe de corpulence, mise à jour par rapport à l’ancienne version du carnet de santé.
  • Il y a désormais deux courbes de suivi du périmètre crânien pour les jeunes enfants : une pour les filles et une pour les garçons, car les différences entre eux commencent très tôt. Et elles s’étendent jusqu’à 5 ans, contre 3 ans auparavant, car les experts ont estimé que le périmètre crânien était une donnée importante nécessitant une observation prolongée.
  • Les périmètres crâniens des parents sont pris en compte. Des abaques de périmètres crâniens adultes, exprimés en écarts-types pour la mère et le père de l’enfant, sont donc désormais représentés en haut à droite de chaque courbe de périmètre crânien.
  • La puberté est indiquée : les âges physiologiques chez les filles et chez les garçons sont représentés en bas des courbes de poids et de taille pour l’évolution de 1 à 18 ans.

Comment lire les courbes de croissance ?

Quel que soit l’âge de l’enfant, l’interprétation des courbes se base sur l’analyse conjointe de la taille, du poids, de l’IMC, du stade pubertaire et des tailles des parents.

Comment interpréter la courbe de croissance du nourrisson, de 0 à 1 mois ?

Les professionnels appellent la courbe de croissance du nourrisson entre 0 et 1 mois la courbe pondérale néonatale. Elle se trouve dans les premières pages du carnet de santé et court du premier jour de vie à la fin du premier mois. Comme son nom l’indique, elle est focalisée sur le poids, non sur la taille.

Pendant ce premier mois, il est conseillé de faire peser bébé toutes les semaines afin de détecter le plus tôt possible d’éventuelles anomalies, que ce soit dans un sens ou dans l’autre : surpoids pour les bébés dits macrosomes, ce qui peut être la conséquence du diabète gestationnel, pendant la grossesse, ou poids trop bas. Le médecin inscrit les résultats sur cette courbe en faisant un point au croisement du poids et du jour de prise de la mesure.

« La croissance, au tout départ, ne sera pas la même selon que le bébé est allaité ou au biberon, précise Céline Chaverot, sage-femme. En général, les bébés allaités grossissent plus vite, quand l’allaitement se passe bien. Mais ils stagnent aussi plus vite que ceux qui sont nourris au biberon. Le professionnel de santé doit tenir compte de la façon dont bébé est nourri lorsqu’il le pèse, afin que les parents ne s’alarment pas pour rien s’il ne prend pas beaucoup de poids les premiers jours par exemple. »

Pics, cassures et plateaux

Certaines pathologies peuvent avoir un impact sur la courbe, comme une allergie aux protéines de lait de vache ou certaines maladies infantiles. « Il faut veiller à ce qu’il n’y ait pas de cassure dans la prise de poids, précise Céline Chaverot. L’essentiel, c’est l’harmonie de la courbe, son évolution régulière. Et il faut également prendre en compte le gabarit des parents. La courbe d’un bébé qui prend peu de poids sera moins inquiétante si ses parents sont minces. »

On peut également observer, grâce à la courbe pondérale néonatale, le pic de croissance des 3 semaines. Mais aussi les « plateaux », lorsque le poids de bébé n’évolue pas pendant plusieurs jours, en raison d’un allaitement ou d’un passage au biberon qui a du mal à se mettre en place, par exemple.

Comment interpréter la courbe de croissance de l’enfant de 0 à 3 ans ?

Jusqu’à 9 mois, les courbes sont complétées tous les mois par le pédiatre, puis lors des rappels des vaccins. « Il est recommandé de mesurer et de peser les jeunes enfants chaque mois jusqu’à leurs 3 ans, pour s’assurer que tout se déroule bien dans leur croissance », souligne Anne-Claire Drummond, infirmière-puéricultrice. Par la suite, le recours aux courbes pourra être plus espacé, tous les six mois environ jusqu’à leurs six ans.

« Tant que l’enfant évolue dans la zone située entre les deux traits foncés, tout va bien. Si l’enfant est au-dessous, il sera davantage surveillé par un professionnel de la santé, sans doute plus que s’il est au-dessus. »

Comment fonctionnent les percentiles et les écarts-types ?

La zone colorée sur le carnet de santé, située entre la courbe haute et la courbe basse, se divise en percentiles pour le poids et en écarts-types pour la taille et le périmètre crânien. Ce sont ces deux éléments qui permettent de savoir si l’enfant est dans la norme ou non.

Prenons un exemple concret : pour le poids, le percentile le plus bas est le 3 et le plus élevé est le 97. Si un petit garçon de trois mois est dans le 50e percentile, cela signifie que la moitié des petits garçons de trois mois pèsent plus que lui et l’autre moitié pèsent moins que lui. Alors que s’il est au 3e percentile, cela signifie que 97 % des petits garçons de son âge pèsent plus que lui et que 3 % ont un plus petit poids.

Si les parents s’inquiètent souvent de voir leur bébé au plus bas des percentiles, ou au plus bas des écarts-types pour la taille, être au-dessus de la courbe doit autant les interpeller. « Si l’enfant est au-dessus de la courbe pour le poids, cela peut êtrele signe d’une maladie ou d’un problème hormonal », précise Anne-Claire Drummond. Là encore, il faut être attentif à une cassure dans la courbe, que ce soit au niveau du poids, avec une prise soudaine et importante, ou de la taille. Un bilan médical s’impose pour diagnostiquer une maladie sous-jacente.

Comment interpréter la courbe de croissance de la naissance à la fin de l’adolescence ?

Jusqu’à 18 ans, on pèse et on mesure en général une fois par an l’enfant, afin de s’assurer qu’il n’y a aucune anomalie de croissance. Plus il grandit, moins on a le nez sur les courbes, même s’il ne faut pas pour autant les délaisser. La puberté est une étape clé dans la croissance de l’enfant et peut changer pas mal de choses, que ce soit au niveau de sa taille ou de son poids.

La taille des parents enfin prise en compte

Le comité d’expertise à l’origine des nouvelles courbes a conseillé de prendre en compte la taille des parents pour interpréter la courbe des enfants jusqu’à leurs 18 ans. La formule de calcul de la taille cible parentale, indiquée en centimètres, retenue dans le référentiel national du Collège des Enseignants de Pédiatrie, est proposée en haut des courbes de croissance des filles de 1 à 18 ans et des garçons de 1 à 18 ans.

Une flèche guide son report vers la fin de la courbe de l’enfant ce qui permet d’établir une distance, exprimée en écarts-types, entre le couloir de croissance de l’enfant et la taille cible parentale. 80 % des enfants en bonne santé auront une taille finale comprise entre – 6 centimètres et + 6 centimètres, par rapport à la taille cible parentale.

La courbe de corpulence : calcul de l’IMC

Les courbes de corpulence représentées dans le carnet de santé pour les enfants entre 1 et 18 ans sont celles proposées par l’International Obesity Task Force (IOTF). Elles permettent de visualiser chez les petites filles et petits garçons le pic de corpulence, situé autour des neuf mois. Mais aussi de repérer l’éventuel surpoids de l’enfant et le risque d’obésité infantile, davantage que la simple observation de sa courbe de poids.

Elles sont basées sur l’IMC, calculé selon la formule suivante : IMC = poids/taille². Il se calcule donc comme celui des adultes, mais ne s’analyse pas de la même façon. Chez l’enfant, l’IMC augmente la première année, diminue jusqu’à l’âge de 6 ans et remonte jusqu’à la fin de la croissance. Plus cette remontée, appelée rebond d’adiposité, est précoce, plus le risque d’obésité à l’âge adulte est grand.

Il est recommandé de surveiller la courbe de corpulence chez tous les enfants et adolescents, quel que soit leur âge, leur corpulence apparente, deux à trois fois par an.

Vous pouvez calculer l’IMC de votre enfant en remplissant avec ses données le tableau ci-dessous :

Calcul de l'IMC de mon enfant

Les données saisies ne sont utilisées que pour calculer un résultat et ne sont pas conservées sur nos serveurs

Courbes de croissance des filles entre 1 et 18 ans

Courbes de croissance des filles entre 1 et 18 ans
FermerCourbes de croissance des filles entre 1 et 18 ans © Afpa
© Afpa

Courbes de croissance des garçons entre 1 et 18 ans

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© Afpa

Des courbes de croissance pour les cas spécifiques

Il existe d’autres courbes de croissance, dont les courbes spécifiques pour les bébés prématurés, nés avant 37 semaines de grossesse, et les bébés de petits poids à la naissance (moins de 1 500 grammes), appelées courbes de Fenton. Elles fournissent une évaluation plus précise de la croissance entre 22 semaines d’âge gestationnel et 10 semaines après le terme.

Comment construire soi-même une courbe de croissance ?

Il est possible de créer sa propre courbe de croissance. Pour cela, on peut construire un graphique en entrant les informations sur la taille de son enfant et son poids.

Comment prendre les mesures de bébé et calculer le périmètre crânien ?

Pour mesurer la taille, on l’allonge sur une surface plane et on étire ses jambes au maximum, sans lui faire mal, évidemment. Une autre personne maintient sa tête droite pour obtenir la mesure du sommet du crâne à la plante des pieds. Le mieux est de s’équiper d’une toise en bois, comme celle utilisée au cabinet de pédiatrie.

Pour peser bébé, on le déshabille et on le pose sur une balance spécifique bébés, afin d’obtenir un chiffre le plus précis possible.

Enfin, pour créer la courbe de croissance du périmètre crânien, on enroule un mètre-ruban souple autour de la partie la plus large de la tête de bébé, en passant bien au-dessus des oreilles, et on prend la mesure.

Comment faire une courbe de croissance sur Excel ?

Plutôt que de se reposer sur la mise à jour occasionnelle du carnet de santé par un professionnel de santé, on peut assurer un suivi plus rapproché de la croissance de son enfant en construisant ses propres courbes. Et on peut ainsi conserver les mesures pour les montrer au pédiatre lors du prochain rendez-vous.

Si on veut entrer les données de poids, de taille et de périmètre crânien au fur et à mesure sur son ordinateur, le mieux est d’utiliser un tableau Excel. On entre dans la première colonne, à gauche, la date de prise des mesures, dans la colonne suivante, le poids, dans la suivante, la taille, et dans la dernière, le périmètre crânien. Une fois les données entrées, on va dans l’onglet « Insertion » qui propose différents types de graphiques dont les courbes en 2D du carnet de santé, mais aussi des courbes en 3D et des graphiques combinés pour suivre en parallèle taille et poids, comme sur le carnet de santé.

Si on n’est pas très calé en tableaux Excel, il est également possible de télécharger une application dédiée à la croissance de l’enfant.

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il y a 2 mois
Une exposition aux écrans avant 3 ans aura un impact sur la santé de l'enfant. Elle entrave le développement cognitif et moteur de l'enfant, voire mêm...
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il y a 2 mois
Encore un peu moins de Liberté! Encore une façon de nous dire comment penser, ce qui est bien ou pas pour nos enfants,par contre interdire les pestici...
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