Homoparentalité : témoignage d’une maman

Publié par La rédaction de PARENTS  |  Mis à jour le

Elodie Moreau

A quel moment avez-vous décidé avec votre compagne d’avoir un enfant ?

En fait, nous sommes un vieux couple. Nous vivons ensemble depuis quinze ans. Depuis le début, le désir d’enfant était évident chez ma compagne. En revanche, de mon côté, il m’a fallu beaucoup plus de réflexions pour combattre les préjugés que j’avais par rapport à notre situation. Et puis, au bout de 6-7 ans, on s’est décidé. Nous avons  choisi la Belgique pour un recours à la procréation médicalement assistée. Nous n’avions pas de préférence sur celle qui devait porter l’enfant, nous avons le même âge, nous en avions envie toutes les deux. Nous avons tenté plusieurs inséminations l’une puis l’autre, mais nous avons toutes deux rencontré des problèmes de fertilité. Après quatre ans d’essai, c’est moi qui suis tombée enceinte.

La loi anglaise et hollandaise permet à l’enfant d’avoir des renseignements sur son donneur à sa majorité. Cela ne vous convenait pas ?

Ce n’est pas la démarche qu’on voulait adopter. Pour nous, c’était faire peser un poids sur les épaules de notre fils pendant dix-huit ans. Là au moins, c’est clair, il n’y a pas de père. On ne cherche pas à combler ce vide. Néanmoins, il a tout de même des référents masculins, comme les cousins, mon frère qui a quatre enfants. Il a aussi deux parrains qui ont une place importante. Mais on lui expliquera sans problème qu’un homme a fait un acte généreux pour nous permettre d’avoir un enfant.Son histoire, c’est quelque chose qu’on aborde au quotidien avec nos familles et amis, en sa présence. Il la connaît même si nous n’avons pas vraiment de conversations avec lui, il est trop petit. Cependant, cela est présent dans notre quotidien, on lui a acheté des petits livres dans lesquels les enfants ont deux mamans. On aborde la chose en douceur.

Dans votre couple, vous partagez-vous le rôle du père et de la mère ?

Pas du tout ! Au contraire, on essaie d’être vigilantes pour être égalitaires. On ne s’attribue pas un rôle particulier. Nous sommes deux femmes, chacune avec son identité. Et puis, qu’on soit un homme ou une femme, chacun de nous a un côté féminin et masculin. Le père n’incarne pas à lui seul l’autorité. Nous sommes juste deux mamans. Le plus important pour nous, c’est d'apporter à notre enfant une bonne éducation, d’être toutes les deux en phase avec ce qu’on lui dit. Nous dialoguons beaucoup.

Au quotidien, le regard des gens sur votre famille est-il pesant ?

Je n’ai pas l'impression de faire l’objet de réflexions. Je ne sais pas si notre situation choque les gens, mais je n’entends pas particulièrement de critiques. En fait, j’ai le sentiment que lorsque les homosexuels ont un enfant, ils sont moins la cible de critiques, comme s’ils rentraient dans la norme. En revanche, ce qui est pesant, c’est le manque de droits. Par exemple, ma compagne n’a aucun droit légal sur Eloi. Nous avons la sensation de ne pas être comme tout le monde.

Que pensez-vous justement du projet gouvernemental ?

Pour le moment, il n’est pas complètement abouti. Selon moi, il est insatisfaisant. Dans notre situation, ma compagne ne devient pas le parent. Elle sera obligée de passer par l’adoption, après une enquête sociale. C’est frustrant de toujours avoir à se justifier. De plus, le mariage, ce n’est pas la panacée, même si c’est symbolique pour certains. Et puis les homosexuels seront obligés de se marier pour adopter…

Songez-vous à avoir un second enfant ?

Oui. Ma compagne aimerait bien sûr porter l’enfant, mais vu nos problèmes de fertilité respectifs, nous verrons bien ce qu’il sera possible de faire…