Nouvelle controverse autour du co-sleeping

Publié par Marie de Laitre  |  Mis à jour le par

Nouvelle controverse autour du co-sleeping

Co-sleeping : 5 fois plus de risque de mort subite

Le co-sleeping, ou cododo, est de plus en plus en vogue mais également de plus en plus controversé. L’Unicef vient donc de répondre à une récente étude publiée dans le British Medical Journal (BMJ), qui soulignait une nouvelle fois le lien entre co-sleeping et mort subite. Elisabeth Briand-Huchet, Pédiatre responsable du Centre de Référence régional pour la Mort Inattendue du Nourrisson à l’hôpital Antoine Béclère (Paris), nous apporte son éclairage sur la question.

Le 21 mai 2013, le British Medical Journal (BMJ) publie une étude, basée sur 5 autres enquêtes, selon laquelle le co-sleeping entrainerait un risque de mort subite 5 fois plus élevé. Le professeur Bob Carpenter, auteur de l’étude, affirme que "88% des décès qui surviennent lors du co-sleeping pourraient être évités si le bébé était couché sur le dos dans un lit adapté près de celui de ses parents". L’étude dénonce par ailleurs des messages qui ne sensibilisent pas assez l’ensemble des parents, se contentant de déconseiller le co-sleeping seulement si les adultes fument, boivent, se droguent, sont très fatigués ou si l’enfant est prématuré. Le Professeur Carpenter conclut ainsi : " la place la plus sûre pour le sommeil d’un bébé est un petit lit dans la chambre de ses parents pendant les 6 premiers mois". L’Unicef vient cependant de contredire cette conclusion sans appel…

Une étude basée sur des données insuffisantes

Lundi 27 mai, un communiqué de l’Unicef conteste l’étude publiée dans le BMJ, en soulignant le manque de données qui ont conduit à la conclusion du professeur Carpenter. Aucune des 5 études sur lesquelles elle se base ne fait mention de la relation entre mort subite et prise de drogue par les parents en cas de co-sleeping, et seulement 2 traitent la question de l’alcoolisation des parents, en occultant complètement celle des pères. De plus, la consommation d’alcool des mères n’a été recueillie que pour 2/5ème d’entre elles. Selon l’Unicef, l’étude du professeur Carpenter ne mentionne pas le fait que le risque de mort subite est plus élevé quand le parent s’endort avec l’enfant dans un canapé, un fauteuil ou un siège. Les données sont donc insuffisantes pour bannir le co-sleeping et l’organisme pour la protection de l’enfance affirme même que le risque du cododo serait "trop faible pour être significatif". Pour conclure, l’Unicef soutient que le lit des parents est un lieu sûr et que le cododo n’est qu’une question de point de vue personnel et culturel.

Co-sleeping : un risque réel pour l’enfant

Selon le docteur Elisabeth Briand-Huchet, la réponse de l’Unicef est plus que contestable. Certes, le fait de s’endormir dans un canapé ou un fauteuil avec son enfant est dangereux "mais on ne peut hiérarchiser les risques et dire que le lit des parents est un lieu sûr pour l’enfant". Elle ajoute que les parents prennent peut-être les mesures de sécurité concernant le co-sleeping dans les premières semaines après la naissance, mais qu’au fur et à mesure, ils relâchent leur attention. Les conclusions contradictoires des études ne permettent pas d’y voir plus clair et rendent floues les précautions à prendre. Selon le docteur Briand-Huchet, le risque de mort subite en cas de co-sleeping est accru, quel que soit l’état des parents ou les précautions prises. Avec des adultes qui boivent, se droguent ou fument, les risques sont évidemment plus élevés. En effet, le tabagisme passif chez l’enfant provoque une saturation des récepteurs du cerveau censés déclencher le réflex d’éveil lorsque l’enfant est en situation de trouble respiratoire. Ce réflex d’éveil est alors moins performant et le bébé plus fragile. Un enfant "en bonne santé" peut normalement rétablir automatiquement la situation, en tournant la tête par exemple, si sa respiration est gênée pour une quelconque raison. "Dans les accidents que nous observons, l’enfant n’a pas pu réagir, et cela le conduit au décès par hémorragie pulmonaire massive". Dans le cas de l’alcoolisation des parents, le risque de mort subite lors du co-sleeping s’accroit puisque les adultes ont un sommeil plus lourd. Pour Elisabeth Briand-Huchet, les messages de l’Unicef ont une portée mondiale, s’adressent à différentes cultures et obligent l’institution à avoir des propos nuancés concernant certaines pratiques plus culturelles que d’autres, comme le co-sleeping. Elle rappelle les précautions indispensables pour une sécurité maximale : faire dormir l’enfant dans un lit de bébé rigide, sans tour de lit, sans oreiller ni couette, ou tout autre "encombrement", dans une pièce à température modérée et bien aérée. Le co-sleeping est à déconseiller selon elle et une vigilance particulière doit être apportée aux systèmes de portage (porte-bébé et écharpes) qui ont entraîné un nombre accru de cas de mort subite ces derniers temps.

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