Les espaces de rencontre parents-enfants

Mis à jour le

Après une séparation, il est parfois impossible pour les adultes de s'entendre. Le conflit est tel que l'exercice d'un droit de visite est très compliqué. Les espaces de rencontre parents-enfants permettent aux enfants de garder un lien avec leur parent absent au quotidien...

Comment devenir parents quand un père et une mère n’ont jamais vécu ensemble ou lorsque la séparation se révèle si conflictuelle qu’elle empêche tout dialogue ? Les espaces de rencontre parents-enfants permettent de maintenir le lien.

L'impact des séparations sur le lien père-enfant

Les ménages deviendraient-ils de moins en moins solides ? Selon l’Insee, près d’un couple sur trois se sépare, voire un sur deux dans les grandes villes. Conséquence pour l’enfant : il doit se partager entre la résidence de sa mère et de son père. Problème : au bout d’un an, un bambin sur quatre perd tout contact avec le parent dont il est séparé (généralement le père). Pourtant, l’enfant a besoin de ses deux parents pour grandir. « A partir du moment où on décide de faire un enfant, qu’on décide de le garder, on ne peut pas exclure le père », rappelle un médiateur familial. La Convention internationale des droits de l’enfant érige d’ailleurs l’accès à ses deux parents comme un droit fondamental. Malgré la séparation, les parents conservent tous les deux l’exercice de l’autorité parentale. Irène Théry, sociologue spécialisée dans le droit et la famille, va plus loin : « Au-delà de la séparation, il existe une obligation corrélative pour chacun des deux parents à maintenir sa responsabilité à l’égard de l’enfant et respecter et encourager celle de l’autre parent. » (note de février 1999)
Mais quelles solutions quand les parents ne s’entendent plus et que le conflit est tel qu’il est impossible de s’accorder sur un droit de visite ? C’est alors que les espaces de rencontre entrent en jeu.

Le rôle des espaces de rencontre

Depuis 20 ans, environ 130 « espaces de rencontre » ont vu le jour en France. C’est seulement depuis une loi du 5 mars 2007, réformant la protection de l’enfance qu’ils sont reconnus juridiquement. Que l’enfant soit privé de l’un de ses parents ou que la situation parentale soit trop conflictuelle, il pourra renouer le contact dans ce lieu neutre et indépendant, s’il n’existe pas d’autre solution. Conçu comme un lieu médiateur, le but est de « maintenir, voire d’établir des relations entre l’enfant et son père ou mère », explique un responsable de l’association centre pilote pour la parentalité, Paris 18e.
En outre, conformément à sa fonction première, cet espace sert aussi de relais pour « passer » l’enfant entre le père et la mère, tel un sas sécurisé, quand la situation est trop conflictuelle. « Avant de connaître notre existence, lors de l’échange de l’enfant, beaucoup de parents se donnaient rendez-vous devant un commissariat de police pour encadrer leurs débordements ! »
Dans l’espace de rencontre de Paris 18e, un tiers des bambins (nourrissons ou enfants en bas âge) ont fait connaissance avec leur papa, en 2007. Soit le couple avait peu connu de vie commune, soit le père avait été remercié pendant la grossesse. Les deux tiers restants avaient perdu tout contact, avec leur père le plus souvent, après la séparation du couple.

Les modalités de la rencontre

Hochets, petites voitures, camion de pompier, poupée… C’est dans un cadre rassurant, parsemé de jeux, que l’enfant rencontre son papa ou sa maman. L’équipe d’intervenants, plus ou moins pluridisciplinaire selon les centres (médiateurs, psychologues, éducateurs…) s’intègre discrètement aux retrouvailles parents-enfants et travaille sur leur mise en relation. « Notre mission consiste à veiller à ce que chacun trouve sa place, à son rythme », explique un responsable de l’espace de rencontre de Paris 18e. Pas question que la mère dépose son enfant et reparte aussitôt ! « La maman doit désigner le père à son enfant, lui expliquer la situation. Même s’il ne parle pas, un nourrisson ressent énormément de choses. Il a besoin de comprendre pourquoi il se retrouve dans les bras d’un inconnu. »
La finalité de l'espace de rencontre parents-enfants ? « Arriver à ce que la confiance et le dialogue soient restaurés pour que les parents deviennent aptes à organiser seuls, de façon pérenne, la constellation familiale. Tout cela dans le cadre de la protection de l’enfant ».

Qui oriente les familles vers ces espaces ?

Plus de 90 % des familles orientées vers les espaces-rencontre le sont sur décision du juge aux affaires familiales (JAF). Le reste des demandes provient d’un choix volontaire. « De plus en plus, à la maternité, les mères qui excluent le père sont informées de la nécessité de la présence de ce dernier », constate un médiateur.
Pour beaucoup de familles qui viennent spontanément, les rencontres finissent par tomber en déperdition. Au contraire, les parents contraints par le JAF de s’astreindre à un espace de rencontre vont jusqu’au bout. « Au début, c’est difficile, ils ont l’impression d’être sous contrôle, presque en prison, raconte ce médiateur. Avec le temps, ils comprennent que c’est une chance. Mais l’aboutissement ne dépend pas des intervenants. Nous sommes seulement là pour accompagner et soutenir. Il faut un vrai désir d’aboutir de la part des parents. A défaut, c’est nuisible pour tout le monde. »
Le temps des rencontres fini, la porte reste toutefois ouverte pour le futur, notamment en cas de « grippage » des relations.

La périodicité et le coût des rencontres

Lorsque l'espace de rencontre n'est pas un simple lieu de "passage" de l'enfant, les rencontres se déroulent à raison de deux heures tous les 15 jours. Mais chaque famille progresse à son rythme. Les rendez-vous peuvent donc s’échelonner sur des périodes très aléatoires (de trois mois à bien plus). Les intervenants évaluent la situation et négocient avec les parents pour y mettre fin lorsqu’ils le jugent opportun ou, au contraire conseillent un renouvellement. Côté prix, la séance est évaluée, en moyenne, à 40 euros par personne. Mais la plupart des espaces de rencontre autorisent une participation financière laissée à la discrétion des parties, selon leurs revenus. Toutefois, l’absence de contribution n’empêche pas l’admission d’une famille.

Sujets associés