Allaitement et travail : comment on fait, en pratique ?

Publié par Hélène Bour  |  Mis à jour le par Solenne Hernandez

En collaboration avec Carole Hervé (consultante en lactation IBCLC)

Allaiter et travailler, c’est tout une organisation ! Voici tout ce que vous devez savoir sur l’allaitement et la reprise du travail.

Puis-je allonger mon congé maternité pour allaiter ?

Officiellement non. Le « congé d’allaitement », instauré dans les années 50, a été supprimé en 1975. Néanmoins, de nombreuses mamans parviennent à prolonger un peu leur allaitement par le biais du congé pathologique postnatal. Ce congé maladie, d’une durée maximale de quatre semaines, est normalement prescrit en cas de problèmes liés à la grossesse ou aux suites de couches. Si votre médecin ou votre sage-femme est compréhensif et convaincu des bienfaits de l’allaitement, il vous l’accordera probablement. Mais il ne doit pas inscrire sur l’arrêt maladie le motif « allaitement » : la Sécurité sociale refusera votre dossier à coup sûr.

Allaitement et code du travail : quels droits au sein de l’entreprise ?

Comment continuer à allaiter quand on reprend le travail ?

Plusieurs dispositions visant à faciliter l’allaitement par les mères qui ont repris le travail figurent dans le Code du travail. L’allaitement (dans l’entreprise ou ailleurs) est un droit pendant la première année de l’enfant. Le local à cet effet doit être séparé de tout local de travail, avoir un point d’eau à proximité, être propre, pourvu de sièges convenant à l’allaitement et correctement chauffé (article L.224-3).

Est-ce que je peux tirer mon lait au travail ?

Selon les articles L.224-2 et L.224-3, les mères qui allaitent et travaillent ont, pour ce faire, une heure par jour, « répartie en deux périodes de trente minutes » (article R224-1), une le matin et une l’après-midi. Attention ! Ces pauses n’étant pas considérées comme du travail effectif, elles ne sont pas rémunérées, sauf convention collective ou accord d’entreprise contraire.

Par ailleurs, comme la femme enceinte, la femme allaitante peut bénéficier, dans certains postes à risques, d’un aménagement des tâches à accomplir. En pratique : ces droits sont souvent méconnus par les employeurs, surtout dans les petites entreprises. Leur respect dépendra donc de vos rapports avec votre hiérarchie et des acquis sociaux en vigueur au sein de votre entreprise.

Allaitement et reprise du travail : comment s’organiser ?

« Certains jours, on en a assez : on part au boulot avec cinquante sacs… C’est tout une organisation ! Aujourd’hui, je me demande comment j’ai fait pour faire tout ça. Mais sur le moment, je ne me voyais pas faire autrement. »

Ces propos de Coralie Camille montrent à quel point la motivation et l’envie d’allaiter son bébé, sont primordiales. Pour vous aider, voici un petit mémo des choses à ne pas oublier le jour de la reprise du travail.

Crèche, nounou et allaitement

A la crèche, ce sont les professionnels qui vous conseilleront, et vous fourniront même peut-être une fiche explicative quant au protocole concernant le lait maternel à la crèche. Si votre enfant est gardé par une assistante maternelle ou une garde à domicilepeu sensibilisée aux questions liées à l’allaitement, veillez à lui donner toutes les informations nécessaires, notamment concernant la conservation du lait maternelPensez à toujours laisser chez la nounou davantage de lait que nécessaire… Votre petit goulu pourrait avoir une subite fringale. Il se peut aussi que la nounou interprète ses pleurs comme un besoin de recevoir davantage de lait. Vous serez toujours heureuse d’avoir un peu d’avance dans des petits contenants. D’autant que pour éviter tout risque bactérien, le lait maternel réchauffé ne se garde pas à température ambiante indéfiniment.

Lait maternel : l’importance du respect de la chaîne du froid

Ne congelez pas de trop grosses quantités à la fois. Ainsi la nounou pourra décongeler les justes quantités et votre précieux lait ne sera pas gâché. Lorsque vous transportez ce lait, veillez à toujours respecter la chaîne du froid. Utilisez toujours une glacière avec des pains de glace, et laissez les biberons le moins possible à température ambiante. A savoir : le lait maternel est très clair, avec un léger dépôt de gras qui se forme sur le dessus après avoir reposé quelque temps. C’est tout à fait normal, il suffit ensuite de le secouer doucement avant de le donner, pour le réhomogénéiser. N’hésitez pas à le spécifier à la nounou pour qu’elle ne soit pas étonnée ou paniquée.

Puis-je concilier reprise du travail et allaitement à plein temps ?

Si vous souhaitez continuer à allaiter à plein temps, cela demande une certaine organisation. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) préconise un allaitement maternel exclusif jusqu’aux six mois du bébé. Comment procéder ? Avant d’aller travailler, tirez votre lait. Vous le confierez à la personne qui s’occupe de votre enfant en votre absence. Ou, encore mieux si vous en avez la possibilité, rentrez allaiter votre enfant. En dehors des périodes de travail, continuez à le nourrir à la demande, jour et nuit, pour stimuler votre lactation.

Allaiter et travailler, n’est-ce pas trop fatigant ?

C’est une crainte souvent lourdement appuyée par l’entourage, tant privé que professionnel. Au moindre coup de barre, certains seront tentés de mettre votre baisse de forme sur le compte de l’allaitement… C’est en partie vrai. Mais, souvent, votre fatigue sera avant tout due aux nouvelles contraintes d’organisation et de rythme liées à la reprise du travail, ce que toutes les mamans qui travaillent connaissent, qu’elles allaitent ou pas. En réalité, si vous avez la motivation suffisante, vous devriez parvenir à cumuler les deux sans trop de difficultés, surtout après un temps de rodage.

Comment puis-je tirer mon lait au travail ?

En ce qui concerne l’opération en elle-même, plusieurs choix sont possibles. Vous pouvez bien sûr tirer votre lait manuellement, mais il faut avoir du temps devant soi et une certaine pratique ! Sachez que certains tire-lait permettent d’extraire le lait des deux seins en même temps, ce sont des tire-lait dits « double pompage ». Cela réduit de moitié le temps d’extraction ! Vérifiez si l’appareil peut être utilisé sur secteur, éventuellement sur un allume-cigare si vous tirez votre lait dans votre voiture, et pas seulement avec des piles. Demandez conseil à votre pharmacien, d’autant que certains tire-lait sont disponibles à la location, et le montant partiellement pris en charge par la Sécurité sociale si l’on a une ordonnance. Des loueurs professionnels existent aussi.

Côté timing, le ou les moments choisis devront correspondre à la sensation de montée de lait. L’idéal étant, en tout état de cause, d’espacer les tirages d’au moins 2 ou 3 heures, au même rythme que bébé boit son lait.

Quel matériel prévoir pour tirer mon lait au travail ?

Allaiter au travail peut parfois tenir de l’opération-commando ! Outre le tire-lait manuel (ISIS d’Avent) ou électrique (Medela, Spectra ou Ameda, de préférence double pompage pour aller plus vite) et les récipients (le tout dans un sac, si possible isotherme, pour maintenir le lait au frais pendant les trajets jusqu’à votre domicile), prévoyez d’éventuels blocs froids (ou, mieux, une mini-glacière) si votre entreprise ne dispose pas d’un frigo. Mais aussi éponge, torchon, goupillon et liquide vaisselle pour nettoyer récipients et tire-lait, si vous préférez le faire tout de suite après usage. Sans oublier des coussinets d’allaitement contre les fuites. Si possible, laissez tout ce matériel sur place.

Allaitement : la liste des choses indispensables à emporter au travail

  • Une glacière pour stocker le lait, avec éventuellement des pains de glace en plus ;
  • Le tire-lait si vous avez choisi cette méthode ;
  • Des pots ou sachets pour stocker le lait extrait ;
  • Des coussinets d’allaitement pour pouvoir en changer souvent en cas de débordement.

Comment conserver mon lait au travail ?

Les temps de conservation du lait maternel

Le lait maternel se conserve au moins 3 à 4 heures à température ambiante (de 19 à 22 °C), donc ce n’est pas trop grave si vous n’avez pas de frigo à disposition dans l’immédiat. Si vous le pouvez, choisissez néanmoins de le réfrigérer, après l’avoir refroidi rapidement sous un filet d’eau froide : il se conserve jusqu’à 8 jours au réfrigérateur (0 à 4 °C, dans la partie la plus froide). Vous pouvez aussi le congeler, pour un usage ultérieur (il se conserve deux semaines dans le compartiment surgelés d’un réfrigérateur, 3 à 4 mois lorsque congelé dans un combiné réfrigérateur congélateur et jusqu’à plus de six mois dans un congélateur séparé, à -18 °C), mais sachez que la congélation détruit certains de ses facteurs anti-infectieux.

Dans quoi conserver du lait maternel ?

Tout récipient bien lavé et pouvant fermer hermétiquement peut convenir. Pour les petites quantités, vous pouvez utiliser pots de yaourts en verre, petits pots pour bébés, petites bouteilles de jus de fruits, voire bacs ou sacs à glaçons. Ou opter pour les sacs de congélation prévus pour le lait maternel (Ameda, Medela, Lansinoh ou Lactisac), très pratiques car ils s’adaptent souvent directement sur certains tire-lait. Utilisez un récipient propre différent à chaque fois au cours de la journée. Le lait doit être étiqueté avec la date, la quantité recueillie, et le nom du bébé s’il est gardé en structure collective.

Comment réchauffer le lait maternel recueilli ?

Attention : pour réchauffer votre lait, surtout pas de micro-ondes, mais de l’eau chaude ou un chauffe-biberon. Le four à micro-ondes ferait chauffer le lait trop rapidement, ce qui détruirait ou modifierait certains de ses composants. Sans parler du risque de brûlure !

Allaitement : et si j’ai des fuites intempestives en réunion ?

Les engorgements et les écoulements intempestifs peuvent effectivement se produire les premiers jours aux heures où votre bébé avait l’habitude de téter. Pour y remédier, tirez votre lait de façon régulière si vous le pouvez aux horaires « critiques ». Vous pouvez aussi porter des coussinets d’allaitement. Une astuce contre les « fuites » : il suffit en général d’appuyer fortement sur les seins (par exemple en croisant les bras) dès que ça commence à « picoter », pour empêcher le lait de couler.

Puis-je imposer que mon bébé soit nourri avec mon lait sur son lieu de garde ?

Sur cette question, c’est le plus grand flou législatif. Lorsqu’il est gardé par une nourrice agréée ou une employée, le don de lait peut être inséré dans le contrat. Certaines nourrices seront cependant assez déstabilisées par cette demande pour exiger de vous la signature d’une décharge.

Le problème se complique lorsque l’enfant est placé dans une structure collective (crèche, maison d’assistantes maternelle, garderie). En crèche, donner à l’enfant le lait tiré par sa mère se heurte à divers obstacles (de disponibilité, d’hygiène et surtout, de désinformation des personnels). Face à ces réticences, aucun texte de loi ne permet à une mère de contraindre une crèche à accepter de donner son lait à son enfant. Aucun non plus, au demeurant, n’autorise les crèches à le refuser. La meilleure solution : la négociation, le dialogue au cas par cas. De plus en plus de crèches mettent en place un protocole avec des conditions d’hygiène strictes pour ce qui est du lait maternel. Certaines autorisent même les jeunes mamans à venir allaiter leur bébé à la crèche ! Conclusion : renseignez-vous en amont pour que tout se passe au mieux.

Allaiter et travailler : ne paniquez pas

Pour parvenir à allaiter tout en reprenant le travail, il est conseillé de lâcher prise, même si c’est plus facile à dire qu’à faire. Certaines questions et angoisses peuvent toutefois vous effleurer l’esprit, voire vous faire paniquer et douter de votre choix, qui est pourtant le meilleur pour votre bébé.

Ne pensez pas que votre lait risque de se tarir parce que l’enfant prend des biberons pendant la journée. Trois ou quatre mois après la naissance, la lactation s’adapte sans problème à la demande.

Ne paniquez pas non plus à l’idée que des écoulements intempestifs « ornent » vos chemisiers d’une auréole disgracieuse… Les engorgements sont, en principe, plus rares au-delà du deuxième mois d’allaitement. Ils surviennent généralement la première semaine de sevrage partiel, le temps que votre corps s’adapte à la baisse de la demande du nourrisson. Les coussinets d’allaitement, sorte de compresses que vous placez dans votre soutien-gorge, permettent, dans tous les cas, d’éviter les accidents. On les trouve en pharmacie, en supermarché ou dans les magasins spécialisés.

Comment faire pour sevrer Bébé avec la reprise du travail ?

Si vous ne souhaitez allaiter votre bébé que lorsque vous êtes ensemble et ainsi ne pas avoir à tirer votre lait au travail, vous devez le sevrer partiellement. Vous opterez alors pour l’allaitement mixte, qui peut très bien fonctionner plusieurs mois s’il est bien mené. Ne vous inquiétez pas si bébé refuse le biberon, la tasse ou la cuillère de votre part : il l’acceptera davantage de la main de la personne qui le garde. Si vous travaillez à mi-temps, le sevrage ne sera pas trop compliqué. Votre bébé ne prendra qu’un, voire deux biberons en votre absence. Commencez à l’habituer 8 à 15 jours avant votre reprise. Si vous travaillez à temps plein, avec des horaires classiques, prévoyez une quinzaine de jours. Remplacez d’abord la tétée de l’après-midi. Puis, au bout de 3 ou 4 jours, celle de la matinée. Enfin, 3 ou 4 jours plus tard encore, celle de la mi-journée. Vous ne donnerez donc plus le sein que matin, soir et nuit. Si vous travaillez à temps plein, avec des horaires décalés, supprimez les tétées comme indiqué, mais aux heures correspondantes. Si votre rythme est plus irrégulier, le sevrage peut être plus délicat. Conservez néanmoins la progressivité du sevrage. Les jours de repos et les week-ends, reprenez l’allaitement à plein temps si vous le souhaitez, pour éviter que votre lactation ne se tarisse.

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36 points
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